Le fédéralisme étant le produit final d’une intégration ne peut pas constituer la volonté d’un consentement des leaders politiques. Une fédération ne se crée pas par la signature d’un accord. Elle doit naitre d’un long processus naturel que doit finaliser des ententes politiques.
Les spécialistes admettent que l’intégration s’initie d’elle-même. Elle s’appuie sur les besoins économiques des populations de deux ou plusieurs sociétés distinctes. Par exemple, la population nigérienne de Diffa se sente plus proche de l’État fédéré de Borno au Nigéria non pas parce qu’elle a des liens anthropologiques mais plutôt pour des besoins économiques. Le Naira, monnaie nigériane, est plus connue à la population rurale de la région de Diffa que le FCFA monnaie nationale nigérienne. Les besoins économiques entre ces populations seront les atouts pour une intégration.
Le projet d’intégration de Burkina Faso, Guinée et Mali, en une seule fédération, parait être une fiction qu’une réalité. Il peut se réaliser en théorie, sur une carte géographique, mais difficilement sur le terrain. Le Mali, dont le plus vaste en termes de masse territoriale, a une partie de son territoire plus liée à la République du Niger qu’à sa capitale politique. Les villes de Tombouctou et de Gao se ravitaillent au Niger, car la distance qui les sépare de Bamako est trois fois plus longue que le trajet à faire pour arriver à Niamey. A part de difficulté liée au trajet s’ajoute l’absence de l’État sur son territoire national. L’État, selon des données contradictoires, est absent sur plus ou moins 70% de portion de son territoire national. Il en est de même pour le Burkina Faso dont 40% de son territoire est hors de son contrôle. Ces deux États feraient mieux de reconquérir l’ensemble de leurs territoires respectifs que de se lancer dans une aventure fictive.
Certes, la Guinée est souveraine sur toute l’étendue de territoire mais il lui manque, comme la plupart des pays africains, des institutions politiques susceptibles d’apporter un développement économique. La junte militaire ferait mieux de penser, après plusieurs décennies de tyrannie, à construire des institutions politiques que de penser au fédéralisme.
L’idée de fédéralisme n’est pas nouvelle à l’Afrique postcoloniale. Le 5 mai 1963, les leaders politiques des pays nouvellement indépendants, se sont réunis à Addis-Abeba pour réfléchir sur l’avenir du continent. Si ces leaders se sont consenti sur la nécessité de conserver les frontières arbitraires, héritage de la colonisation, la question du fédéralisme les a divisés. Le sommet a plutôt doté l’Afrique ‘d’une Organisation de l’Unité Africaine (OUA) au détriment d’une fédération-les États Unis d’Afrique.
Le même scenario s’est produit en 2002 en Afrique du Sud, pendant le Sommet des Chefs d’État et de Gouvernement de l’OUA. Lors des délibérations, l’ex-président de la Libye, Mahamamar Khadafi a proposé que l’OUA devienne une fédération et Sirte, ville libyenne, sa capitale politique. L’ancien Président, Nigérian, Olesegun Obasanjo, s’y est opposé. Le sommet a réussi a transformé l’OUA en Union Africaine.
Les trois putschistes, dont l’intégration de leurs États respectifs en une fédération, fait partie de leur agenda politique feraient mieux de se consentir sur les problèmes internes auxquels font face leurs populations. Leur projet de fédéralisme paitre une distraction qu’une solution au problème de gouvernance qu’ils ont promis de résoudre.
Dr. Mohammed D. UMATE
Spécialiste des Relations Internationales, modzate2@gmail.com