La visite du chef d’état-major des armées du Niger au Mali suscite encore beaucoup de polémiques et d’interprétations, les plus tendancieuses.
Si pour certains analystes, cette visite paraît à plus d’un titre surprenante au regard des relations tendues entre les autorités maliennes et nigériennes depuis l’avènement des militaires au pouvoir au Mali, d’autres par contre trouvent que les deux pays voisins qui partagent le même combat contre le terrorisme sont obligés de fédérer leurs stratégies, en vue d’endiguer l’insécurité grandissante à leurs frontières.
Ce n’est donc pas étonnant que la visite du Général de division Mody Salifou le 9 Mars auprès de son homologue malien le Général Oumar Diarra en tête d’une forte délégation dont le but aussi est le raffermissement des relations nigéro-maliennes devenues une nécessité pour faire face aux défis communs.
Des élucubrations de tout genre ont fusé de toute part pour attribuer à cette visite la preuve de l’échec de la lutte contre le terrorisme au Niger. Les autorités nigériennes seraient donc venues s’enquérir des meilleures stratégies de lutte contre le terrorisme chez le voisin malien en vue de les reproduire sur son territoire ?
Et pourtant, un bilan sans complaisance de la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel fait ressortir un fait incontestable : les stratégies de lutte élaborées par les juntes militaires malienne et burkinabè ont montré toutes leurs limites et pis contribué à faire de ces pays des sanctuaires de bandits de tout acabit. Pour preuve, les deux pays voisins au Niger ont perdu au moins la moitié de leur territoire chacun, alors que le Niger a su garder l’intégrité de son territoire. Les prétendues forces de frappe de leurs armées n’ont pas pu repousser la menace terroriste qui bien au contraire gagne du terrain à tout point de vue au Burkina Faso et au Mali, avant d’impacter leur voisin.
Dès lors, l’on peut tirer la leçon des politiques d’isolement entreprises par le colonel Goïta et le capitaine Traoré à l’encontre des partenaires de la sous région, voire à l’international. Une vérité s’impose à tous ces pays : la lutte contre le terrorisme doit s’inscrire dans une stratégie commune et concertée dans la sous région, si l’on veut aboutir à une victoire totale.
Comment dans ce cas, copier des stratégies qui ont déjà échoué lamentablement alors que le Niger a montré sa capacité à contrôler son territoire ? C’est une grande curiosité pour tout observateur averti et soucieux de porter une critique objective. A ce titre, le chef d’état-major du Mali a tout intérêt à intégrer le comité des Etats-majors de la sous région pour accéder à la lutte commune contre le terrorisme.
C’est pourquoi, malgré le retrait du Mali du G5 Sahel, les autres pays n’ont pas ménagé leurs efforts pour convaincre les autorités de ce pays à reprendre sa place auprès d’autres pays qui partagent le même combat. Le G5 Sahel, a poursuivi son chemin en tenant même un sommet extraordinaire en février dernier à l’issue duquel le Tchad a passé le flambeau à la Mauritanie qui préside désormais les destinées de l’organisation.
C’est à ce titre que les dirigeants des quatre pays (Mauritanie, Tchad, Niger et Burkina Faso) ont demandé au Mali de reprendre sa place au sein de l’organisation. Le déplacement du chef d’Etat-major des Armées du Niger, le Général de Division Mody Salifou au Mali s’inscrit donc dans cette dynamique contrairement aux diverses allégations dénuées de sens entretenues par les partisans de la division et de l’embrasement.
Il faut donc sortir du piège tendu par les marchands d’illusion qui veulent vendre des stratégies de replis inefficaces face à un adversaire aussi redoutable qu’est le terrorisme dans la sous région. Pour ce faire, une coopération accrue devrait être encouragée entre les états major des pays concernés par ce fléau. Ni le populisme, ni la division au sein de la sous région ne pourront venir à bout du terrorisme, mais seules des stratégies concertées bien élaborées par les différents états majors pourront faire face à cette douloureuse réalité dont souffrent les populations du Mali, du Burkina Faso et dans une moindre mesure du Niger.
ABOUBACAR SOUMAÏLA