Visiblement au Mali, la date du référendum constitutionnel fixée au 18 juin 2023 et la légitimité de son organisation par la junte militaire malienne constituent désormais deux épines dans les pieds d’Assimi Goïta. Outre la fixation de la date du référendum constitutionnel, c’est son contenu qui a suscité une levée de boucliers du front « anti-laïcité » constitué par l’association des femmes du Mali, le club de soutien à l’imam Mahmoud Dicko et la ligue islamique des prédicateurs du Mali.
Ces combattants « anti-laïcité » exigent le retrait du mot «laïcité» dans le projet de Constitution élaborée sous la tutelle de la junte militaire malienne. «Il s’agit de retirer le mot « laïcité » de notre Constitution. La laïcité n’était pas connue au Mali avant l’arrivée des colonisateurs. Notre souhait est de retirer ce mot avec ses dérivés (laïque ou laïcité) et maintenir un concept consensuel.
Il s’agit d’un État multiconfessionnel où chacun va exercer librement sa religion ». Dans un pays dominé à 90% par les habitants de confession musulmane, ce front uni autour des intérêts de l’Islam craint de voir le pays basculer en faveur d’une Constitution qui s’écarterait des valeurs islamiques, fondements aujourd’hui de la culture de ce pays.
Aussi, ce front menace d’appeler l’ensemble des maliens à voter contre le référendum constitutionnel fixé le 18 juin prochain. Le second font qui menacent aussi ce projet cher à Assimi Goïta est constitué de vingt partis politiques qui recommandent un retour à l’ancienne constitution qui ne devrait pas connaître un toilettage conformément aux vœux de la junte militaire.
Ce collectif d’associations et de partis politiques qui désormais se reconnaissent autour de la dénomination « Appel du 20 février pour sauver le Mali » est monté au créneau et a livré sa ferme intention d’empêcher par des moyens légaux la tenue de ce référendum constitutionnel. C’est la légitimité de la junte militaire malienne en vue de l’organisation du référendum qui est ici mise en cause et la question sera soumise à l’instance judiciaire compétente pour une décision définitive.
Ce réveil brusque des forces vives de la nation, contre le projet de référendum constitutionnel juste après la fixation de sa date révèle la formation d’une fronde sociale de grande envergure contre la junte militaire malienne. Outre, les activistes de la société civile malienne qui croupissent déjà en prison pour avoir dénoncé les travers de la junte militaire, ce sont cette fois ci deux poids lourds qui viennent agrandir les mouvements de la contestation au Mali.
Une véritable épine dans les pieds d’Assimi Goïta, qui devra soit céder aux desiderata de ces mouvements contestataires ou engager un bras de fer qui pourrait offrir un boulevard à d’éventuels aventuriers de l’armée sûrement en quête d’opportunité. L’intelligence des militaires au pouvoir les amènerait sûrement à ne pas élargir le front à celui du Nord constitué déjà par les mouvements rebelles et l’emprise certaine des terroristes qui menacent sérieusement la tenue du référendum constitutionnel.
La junte militaire malienne au pouvoir doit régler non seulement le contenu du projet de référendum constitutionnel mais aussi son exécution. Beaucoup de Maliens s’interrogent aujourd’hui encore sur le respect de cette date, au regard du contexte sécuritaire du pays, et aussi de l’inadéquation de son contenu aux valeurs sociales des populations.
ABOUBACAR SOUMAÏLA