Vladimir Poutine met-il de l’eau dans sa Volka ? Le sommet Russie-Afrique le contraint-il à revoir sa copie en édulcorant ses propos ? Ces interrogations sont suscitées à raison par l’attitude du leader russe ce Lundi 24 Juillet à travers un article publié sur le site du Kremlin, où il assure que Moscou peut continuer d’approvisionner en céréales les pays africains qui subissent les conséquences de l’expiration de l’Accord céréalier mis en place en 2022.
La Russie s’engage donc à compenser le manque à gagner, l’écart de la quantité de céréales subitement interrompue par la récente décision du Kremlin de mettre fin à l’Accord sur les céréales. Dans un article publié sur le site du Kremlin intitulé « la Russie et l’Afrique : unir les efforts pour la paix, le progrès et un avenir prospère », à deux jours du sommet Russie-Afrique prévu pour ce Jeudi 27 Juillet 2023, le locataire du Kremlin affirme « je souhaite rassurer sur le fait que notre pays est capable de remplacer les céréales ukrainiennes sur une base commerciale et sans frais, d’autant que nous attendons une autre récolte record cette année ».
Et de renchérir « la Russie poursuivra ses efforts énergiques pour assurer la distribution de céréales, de produits alimentaires, d’engrais et d’autres biens vers l’Afrique (…) le réseau des ambassades russes et des missions commerciales en Afrique sera élargi ». Ces propos de Poutine en prélude au sommet Russie-Afrique qui devra se tenir ce Jeudi à Saint-Pétersbourg n’étonne guère les observateurs avertis de la géopolitique en lien avec les convoitises vis à vis du continent africain.
Il ne faut pas s’attendre à une Russie qui n’ait rien à offrir à ses partenaires potentiels africains après l’arrêt brusque de l’Accord sur les céréales, d’autant plus que cette décision a suscité un mécontentement voire une déception de l’Union Africaine. En effet, l’Union africaine avait exprimé son regret, suite au retrait russe de l’Accord sur les céréales
Signé en Juillet 2022 à Istanbul dont la reconduction s’est faite à deux reprises. Cet Accord tombé à point nommé a permis de rouvrir les exportations agricoles ukrainiennes par la mer noire malgré l’offensive russe. Ainsi, en un an, ce sont 33 millions de tonnes de céréales des ports ukrainiens, essentiellement du maïs et du blé sorties des ports ukrainiens contribuant ainsi à stabiliser les prix alimentaires mondiaux et surtout à écarter les risques de pénurie. Les dirigeants africains se sont donc sentis abandonnés voire trahis par le partenaire russe et ont réclamé par la voix du président de la Commission de l’UA, Moussa Faki Mahamat de demander aux belligérants de résoudre l’épineux problème de l’approvisionnement des céréales.
« J’exhorte les parties prenantes à résoudre les problèmes pour permettre la reprise du passage continu et sécurisé des céréales et engrais d’Ukraine et de Russie vers les régions qui en ont besoin, notamment l’Afrique ». La Russie a déjà préparé un terrain favorable à ses propres intérêts puisqu’elle a réussi en amont à brandir la menace de la pénurie au partenaire fragile et vulnérable africain, le contraignant de fait à faire profil bas et fort probablement à succomber à ses propositions. Vladimir Poutine connaissait déjà le point faible de ces pays africains toujours en quête de « pitance » pour leurs populations à l’échelle internationale.
Désormais, les deux offres que la Russie proposera à ses partenaires sont connues de tous : l’approvisionnement en céréales et l’expansion de son empire à travers le groupe Wagner. Cette situation humiliante, qui a fait des pays africains des Etats immatures incapables de se prendre en charge devenant ainsi les jouets aux mains de puissances économiques devra interpeller les décideurs africains afin qu’ils inspirent et concrétisent l’autosuffisance à tous les niveaux, en leur permettant ainsi d’avoir une marge de manœuvre lors des rencontres ou des sommets stratégiques pour mieux défendre leurs intérêts.
ABOUBACAR SOUMAÏLA