Le Burkina et le Mali, qui développent un partenariat avec Wagner sont-ils avertis ?
Qui pouvait encore croire qu’une telle guerre fratricide allait se déclencher sous nos yeux et se perpétuer continuellement pendant une journée entière, 2, 3, 4, 5, 6 et sans arrêt ? Depuis le Samedi 15 Avril 2023 en effet, des bombes de feu pleuvent sur les populations innocentes soudanaises et tuent impunément des civiles, hommes, femmes et enfants, qui prennent le risque de fuir pour se sauver de la peur, de la soif ou encore de la faim.
Car il n’y a que deux options uniquement qui s’offrent aux soudanais pour espérer survire de telles affres. Soit, ils restent terrés dans les maisons et mourir de faim, de soif ou même de peur, du fait de manque de réserves de nourriture, des coupures d’eau et d’électricité, soit, ils sortent dans l’espoir de trouver du secours improbable et se faire tuer par des balles perdues dans les rues, même de la capitale Khartoum.
Une immense et épaisse fumée noire, ocre, nauséabonde couvre le ciel soudanais en signe déjà de mauvais temps. Des organisations internationales, des groupes des Etats puissants, des organisations communautaires et des personnalités s’expriment visiblement en regardant la position des grandes puissances tutélaires, qui habitent la folie des généraux El Burhane et El Hemedti.
Qui sont les belligérants ?
Lorsqu’on regarde de très près les acteurs de terrain en place, on se rend compte que le général El Burhane est soutenu par Washington et ses conseillers militaires souvent sous le dossard de la central intelligent agency (CIA) et le général El Hemedti, patron des forces de soutien rapides (FSR) lui par contre est soutenu par la Russie via le groupe privé des mercenaires Wagner. Le général El Burhane a même souvent obtenu la visite de Wiliiam Burs, le directeur général de cette institution des renseignements américains très pointus (à en croire les sources des confrères français), sans pouvoir malheureusement anéantir l’avancée du groupe de mercenaires privés russes Wagner, qui avait son plan de guerre déjà timbré dans sa mémoire et eux n’ont pas intérêts que cette guerre s’arrête.
Au-delà du simple fait que c’est l’armée nationale soudanaise commandée par le général El Burhane qui a pris le pouvoir depuis la chute de l’ancien président soudanais Mohamed El Bachir, l’autre général déchu, il y a la puissance de feu et une formation très fine de la milice privée FSR de l’ex président El Bachir commandée par le général El Hemedti, une force dite paramilitaire au Soudan, qui assurait également la sécurité de l’ex président soudanais et dont le patron est le numéro 2 de l’armée nationale. En plus du soutien des Américains d’un côté au général El Burhane et des Russes de l’autre côté, les deux généraux en guerre savent qu’il y a la Chine, qui occupe une position médiane, une bonne place dans la vie économique du Soudan et qui joue à un jeu d’équilibriste, comme il a su le faire déjà en Ukraine.
D’autant que la Chine exploite du pétrole, du bois tropical au Sud Soudan, d’autres minerais dans le Nord et trouve une aubaine stratégique en la position du pays. Mais pour affirmer toute sa suprématie sur le Soudan, en tant qu’homme fort depuis la chute du président El Bachir, le général Burhane entend quant à lui fusionner les paramilitaires des FSR au sein de l’armée nationale dans une prochaine reforme et dont le général El Hemedti craint pour son sort, alors même qu’il connait les arcanes du pouvoir dans son pays.
Ce qui correspond à un anéantissement pour le général El Hamedti, qui a décidé de prendre les devants en lançant l’assaut le premier afin d’éviter de se faire enterrer vivant. Avec l’appui de Wagner, les deux généraux ont finalement engagé leur pays dans une guerre sans fin dont ils porteront la responsabilité devant l’histoire.
Le poids des appels à un cessez-le feu et les enjeux socioéconomiques au Soudan !
Le poids des appels au cessez-le feu pèse autant que l’enjeu autour des mines, du pétrole et du bois dans ce Soudan très riche en ces matières qu’attendent les industries chinoises, américaines et russes. Le Soudan comme d’ailleurs la plupart des pays africains cristallisent les intérêts des puissances économiques et militaires, qui recherchent les matières rares pour alimenter les industries technologiques du monde moderne.
Les Soudanais vivent une guerre par procuration aussi barbare que meurtrière entre les intérêts des puissants 78 ans après la 2è guerre mondiale. La guerre froide a changé de nature et a pris une forme plus subtile et plus dangereuse qu’après celle de la fin de seconde guerre mondiale de 1945.
Les puissances économiques mondiales à savoir les Etats-Unis d’Amérique, la Chine, la France, l’Angleterre ou encore la Russie peuvent bien arrêter la guerre au Soudan, en Centrafrique ou en RD Congo si elles le veulent bien. C’est la grande leçon que les Maliens, les Burkinabè ou encore les Centrafricains doivent tirer de leur partenariat avec le groupe de mercenaires privés Wagner, qui incarne les intérêts de la Russie, une raison pour laquelle elle ferme les yeux pour laisser libre cours à la guerre.
Et pourtant, la Chine a toujours clamé qu’elle met sa puissance au service de la paix pour le monde. Parce qu’on devrait justifier son statut de grande puissance lorsqu’on peut imposer aussi la paix au monde, exactement comme l’on peut imposer la guerre.
Wagner veut non seulement obtenir la part du gâteau pour la Russie qui a toujours échoué dans ses tentatives de conquérir l’Afrique, mais aujourd’hui veut absolument intégrer le cœur du continent (africain) par d’autres subterfuges indirectement organisés. En réalité, la guerre au Soudan profite moins aux belligérants qu’aux puissances économiques.
La grande perdante de cette guerre par procuration comme ailleurs est la population soudanaise. Cela est déjà arrivé au Tchad, en Centrafrique, au Rwanda, en Angola, en Ethiopie et ailleurs sur le continent africain.
Et le manque de leadership et de vision des dirigeants africains, en vue de définir et d’implémenter des politiques publiques inspirées à même d’ériger des nations africaines vertueuses reste la principale cause d’un affaiblissement continu du continent et de ses institutions. Il est temps que les dirigeants africains s’éveillent à un sursaut patriotique adapté aux réalités du moment dans un processus de développement inclusif, où la population est partie prenante.
MOUSSA NAGANOU