Le groupe militaire privé russe Wagner a-t-il déjà pris ses quartiers à Ouagadougou ? Pour l’heure, la question reste entière. Il n’y a, en tout cas, jusque-là, rien pour le confirmer, même pas la moindre photo, en dehors bien évidemment des supputations sur sa présence au Burkina Faso. Par contre, le partenaire russe lui y est. Ce d’autant même que la sympathie envers Vladimir Poutine et son pays est quotidiennement manifestée dans les rues de Ouagadougou avec des slogans favorables scandés et des drapeaux aux couleurs rouge-bleu-blanc brandis. Ce d’autant que l’ambassadeur de France au Burkina Faso et les forces spéciales de l’opération ‘’Sabre’’ ont été appelés à débarrasser le plancher pour certainement ne pas gêner l’Elysée qui rechigne à l’idée de travailler un jour avec les hommes d’Evgueni Prigojine.
Quelle sera l’option de Ouagadougou dans cette nouvelle coopération ? Autrement dit, le capitaine Ibrahim Traoré va-t-il appliquer à la lettre le même cheminement que son frère d’armes et voisin, le colonel Assimi Goita ? Si Ouagadougou venait à opter pour le ‘’copier-coller’’, on ne tardera pas à voir les colosses de Wagner dans la sécurité présidentielle de Traoré et quelques localités. Mais le tombeur de Damiba peut bien trouver une formule à la burkinabè de la coopération avec la Russie, autre que celle de son voisin du Nord. Visiblement, Ouagadougou est dans l’hésitation entre un éventuel déploiement de Wagner à la malienne ou une coopération avec la Russie qui ne s’encombrera pas du sulfureux Prigojine. Il y a de quoi s’attendre à voir à Ouagadougou un schéma différent de celui de Bamako, en ce que toute collaboration avec le groupe Wagner, à présent étiqueté d’organisation criminelle par les Etats-Unis d’Amérique et ses partenaires occidentaux, peut attirer à son auteur les foudres de la communauté internationale. Outre cette pression, les burkinabè se doivent également de mesurer le bilan mitigé de Wagner au Mali qui n’est pas loin du qualificatif calamiteux, au regard de tout le mauvais procès fait au régime de colonels de Kati relativement à son non-respect des droits de l’homme (à cause de mauvais comportements de son ‘’si précieux partenaire’’) dans la gestion de la question sécuritaire.
Faisons remarquer que la démarche de Ouagadougou dans sa rupture d’avec Paris semble plus douce que ce à quoi l’on avait assisté dans la relation franco-malienne. Pour le moment, il n’y a pas eu la moindre invective virulente. C’est à l’honneur des autorités burkinabè qui ont trouvé les mots civilisés et le bon ton pour signifier à l’ex-puissance colonisatrice son désir de la voir partir. Disons que c’est aussi bien réfléchi de la part de Ouagadougou, car quoique la France soit en ce moment en mauvaise posture au Sahel, elle garde de solides marges de manœuvre dans les relations internationales et même une certaine influence régionale.
OUMAROU KANE