Vive le CNSP ! Abas les impérialistes et les traitres de la Nation ! Tous derrière le CNSP pour la conquête de la vraie souveraineté ! Tel pourrait se résumer l’engouement des populations sorties massivement soutenir l’avènement du général Tiani et de son équipe à la tête du Niger, suite au coup d’État du 26 Juillet 2023.
L’euphorie était ainsi de mise et entretenue par l’espoir d’un réel changement porté par cette « révolution » dont la mission première est d’assainir les finances publiques, tout en favorisant l’émergence d’une nouvelle race de citoyens nigériens désormais attachés à l’orthodoxie financière et soucieux de la bonne gestion de la chose publique.
Cette attente du peuple qui se traduit aujourd’hui par la nécessité de l’État de recouvrer les fonds injustement tombés dans l’escarcelle de certains dirigeants et agents véreux des régimes précédents demeure encore la condition sine quo non de la réussite du CNSP, afin d’éviter de retomber dans le cycle tragique et fort regrettable de l’éternel recommencement.
Certes, condamner l’ancien pouvoir tout en brandissant les tares qui sûrement ont précipité sa chute est une démarche louable mais malheureusement fort insuffisante, si ces nouveaux messies du peuple ne sont pas en mesure de faire mieux que ces dirigeants déjà vomis du peuple et jetés désormais dans la poubelle de l’histoire.
Malheureusement, après 100 jours passés au sommet de l’Etat, la gouvernance CNSP sous le général Tiani commence à susciter de l’inquiétude chez de nombreux citoyens qui craignent une fâcheuse reconduction des travers tant décriés inhérents aux régimes passés et plus spécifiquement à celui du PNDS.
Ces régimes s’étaient en effet caractérisés par des recrutements des proches, amis et parents souvent incompétents à des postes stratégiques. On avait tous décrié une telle pratique impropre à l’éclosion d’un État émergent qui trouvait sa légitimité dans les tristes propos du Général Salou, qui en réponse à ses détracteurs qui avaient stigmatisé l’emprise du népotisme au cœur de son pouvoir, avait lâché sans vergogne cette phrase restée tristement célèbre <<Qui a recruté celui qu’il ne connait pas ?>. Ces propos ont suscité une véritable déception au sein des citoyens en vérité naïfs vis à vis du comportement réel des dirigeants nigériens et dévoilé une triste vérité, à savoir que la conquête du pouvoir sous nos cieux a pour sombre finalité le rapprochement des proches, amis et parents de la mangeoire de l’État, une véritable caverne d’Ali baba.
Loin donc de miser sur les compétences des nigériens, c’est encore le même principe qui prévaut avec nos nouveaux révolutionnaires. L’inadéquation profil- emploi est la règle et constitue une continuité du culte de la médiocrité, au moment où le peuple nigérien s’attend à une véritable rupture.
Pourtant, jamais une véritable refondation du pays n’a réussi à faire l’économie de la qualité des hommes, des ressources humaines compétentes ou selon l’expression du prix Nobel d’économie Gary Baker (1992) du <<capital humain>>, le véritable moteur de tout développement inclusif. C’est donc un fait irréfutable que le mépris des compétences va de paire avec celui du développement, du bien-être des populations et favorise par conséquent la dépendance accrue vis à vis de l’extérieur.
Pour l’heure, les 100 jours passés au sommet de l’Etat loin de constituer les prémices d’une véritable rupture avec l’ordre ancien risque de consolider les mauvais acquis du système condamné par l’ensemble des Nigériens. Cette période d’essai insatisfaisante à plus d’un titre devra néanmoins servir de base, de rampe de lancement pour une véritable remise en question, afin que la profonde désillusion qui progressivement s’empare des valeureuses populations nigériennes, déjà fort visible ne se transforme en un rejet quasi total du système Tiani, avec pour corolaire de donner raison aux détracteurs du coup d’État du 26 Juillet qui assimilaient ses véritables mobiles à des <<convenances personnelles >>.
Le pire bilan de cette irruption prétorienne de l’armée après la fin de la Transition serait que les mêmes populations qui l’ont soutenue soient obligées de garder en mémoire que ce fut en réalité un coup d’État pour rien, donnant ainsi au monde entier l’image d’un peuple nigérien qui ne sait pas ce qu’il veut, depuis plus de 60 années d’indépendance, rythmant la vie politique de la nation par de brusques ruptures constitutionnelles, sans jamais engendrer un monde meilleur. N’est-ce pas monsieur Mahamadou Nouhou Arzika, le potentiel aspirant au haut fauteuil de président du conseil consultatif national (CCN)?
ABOUBACAR SOUMAÏLA