Et pourtant, « la puce » sur la situation chaotique de la presse privée nigérienne
« est tombée dans l’oreille du Chef de l’État nigérien, le Général Abdourahmane
Tiani » ! Les bruits des caméras sont parvenus au président Tiani, les chuchotements
des associés des journalistes et des médias privés nigériens évoquant leurs
mécontentements, en réalité la colère de la presse privée nigérienne localement ou
africaine plus largement via le bout visible de l’iceberg, une colère ébruitée, imagée
et projetée par l’idée de « journée de caméras mortes » à travers la semaine
culturelle et la couverture de toute l’actualité nationale ou internationale depuis le 26
Juillet 2023 au Niger.
Mais est-ce normal aujourd’hui encore que au regard des ambitions panafricaines
affichées du Général Abdourahmane Tiani, du Colonel Assimi Goita ou du Capitaine
Ibrahim Traoré que la presse privée Burkinabè, Malienne et Nigérienne souffre
toujours des mêmes maux et des mêmes défis au sein de la confédération des États
du Sahel que celle Sénégalaise, Nigériane, Tchadienne, Togolaise, Guinéenne,
Ivoirienne, Béninoise, bref, la presse privée de tous les pays du continent sans
distinction de l’option politique en cours dans le pays connaisse les mêmes soucis,
les mêmes craintes, les mêmes difficultés et les mêmes défis socio-économiques,
aussi bien dans les mains des dirigeants politiques africains élus, que ceux militaires
imposés au pouvoir par les armes ? Très malheureusement, la réponse s’exprime
avec éclat dans l’affirmative, parce que depuis plusieurs décennies, malgré le
professionnalisme incarné par certains médias, par certaines Rédactions, les
journalistes peinent toujours à survivre eux-mêmes et à asseoir des entreprises de
presse à la hauteur des ambitions panafricaines, prônées par les dirigeants africains.
Il faut donc appeler un chat par son vrai nom de « chat » en Afrique, d’autant plus
que sur le continent africain la presse privée est en même temps, le parent pauvre de
la démocratie aux côtés des hommes politiques dits « élus aux suffrages universels
», mais aussi la bête noire à abattre pour éviter ses commentaires dénudant la réalité
des prétendus dirigeants civils ou militaires d'une part et d’autre part, une presse
assimilable à « la souris de Mosquée, d’Église ou de Synagogue » totalement
désarmée par certaines armées et laissée à elle-même, face aux actualités
brûlantes, avec ses seuls outils de fortune pour décrire, aimer et haïr les multiples
facettes de la donne politique à l’aide des pinceaux, calepins, stylos et ciseaux pour
dessiner, peindre, couper, découper et recouper les faits pour extraire enfin
l’information, à servir au public comme la substance nutritive attendue impatiemment
chaque matin par les citoyens Africains pour enrichir, colorer et orienter leurs
journées. Entre les mains des hommes politiques élus et les militaires leur ayant
arraché pouvoir de force, les journalistes africains sont réduits à l’esclavage des
temps modernes, la presse privée est ainsi orpheline de l’Etat et des dirigeants en
place, même dans leurs propres pays, comme s’ils tombaient du ciel à l’image des
extraterrestres et n’étaient pas issus du peuple, alors même qu’ils sont de toutes les
batailles de la libération des énergies sociales et des « esclaves des salons » !
La cause des échecs des politiques publiques !
Qu’il s’agisse des dirigeants élus ou des militaires s’adjugeant le pouvoir d’Etat
depuis les indépendances proclamées dans les années 1960, la presse privée est
systématiquement violée et écartée des méandres du pouvoir, alors même que celle-
ci assume un rôle stratégique vital et contribue grandement à la sensibilisation de
l’opinion publique et à l’émergence d’une citoyenneté responsable, capable de bien
comprendre et de porter les politiques publiques. Ceux qui déplorent seulement les
travers des régimes militaires contre la presse privée Africaine en Guinée-Conakry,
au Tchad, dans les pays du Sahel et ferment les yeux d’hypocrisie sur la grave
situation des confrères au Sénégal, au Nigeria, en Gambie, au Kenya ou au Togo
sont maladroits et injustes, alors même qu’ils sont du pareil au même.
Depuis plus de soixante ans d’indépendance, le continent africain a du mal à faire
émerger ou de laisser émerger des véritables entreprises de presse dignes de ce
nom et à même de symboliser l’image d’une Afrique des espoirs. Malgré la belle
élection montrée comme telle par la presse africaine, c’est un geste symbolique
frappant les esprits consistant à nommer le journaliste indépendant Pape Aly Niang
comme dirigeant du quotidien d’État, au lieu d’apporter une solution globale devant
alléger et faciliter la vie des hommes des médias sénégalais par la prise d’une
décision visant à donner les moyens à la presse privée pour dignement exprimer
l’image et la voix du Niger, à le pays et à l’échelle internationale.
A la lumière des comportements des dirigeants politiques africains et des hommes
en armes, souvent surexcités au pouvoir, le dénominateur commun reste la crainte
des médias privés et leur ballonnement, les mettant aux abois, tout en s’appuyant
tout de même, sur les acteurs des médias d’Etat, étant tous des fonctionnaires. Ainsi,
la plupart des hommes politiques africains n’incarnent guère des modèles de
dirigeants capables de grandes réalisations socio-économiques et la plupart des
militaires parvenus au pouvoir sont sans vision réelle et concrète, d’une véritable
ambition politique pour leurs pays.
La presse privée Africaine doit repenser son propre sort !
Comment est-ce qu’un pays, un État normal peut exclure le monde des artistes et
des artisans de l’information, c’est-à-dire ceux qui aident quotidiennement à créer, à
façonner, à raffiner et à faire émerger des véritables consciences citoyennes à
travers tout un continent, l’Afrique et le monde entier et espérer en même temps
réaliser du progrès ? Comment est-ce possible d’étouffer les talents du savoir, du
savoir-faire, du savoir-être et du savoir-vivre communicationnels d’une société et
prétendre la pousser au progrès ou même la développer ?
Des questions prégnantes qui prévalent aujourd’hui au sein des Rédactions des
médias privés en Afrique et en appellent de toute urgence à des décisions
ambitieuses, sinon audacieuses des dirigeants du continent africain, s’ils veulent être
au diapason du contexte géopolitique et géostratégique du moment, dans un monde
redevenu multipolaire dont les dirigeants réellement conscients de tous les enjeux de
ce nouveau monde doivent savoir transformer toutes les forces en alliances
stratégiques ! La presse privée Africaine doit méditer profondément sur les véritables
causes de son exclusion par toutes les gouvernances politiques, aussi bien militaires
que civiles, au lieu de se recroqueviller sur elle-même par faiblesse d’esprit ou par
repli identitaire sur elle-même, en pleurant éternellement son sort plutôt que de
proposer des idées, des stratégies ou des projets de communication, tout aussi
audacieux que les ambitions les attentes des populations nouées et noyées dans les
ambitions des dirigeants du continent noir de l’Afrique et de sa diaspora. Agissons
ensemble maintenant pour la bonne cause !
MOUSSA NAGANOU