La presse privée malienne est vraisemblablement sous la forte pression exercée par la junte militaire qui lui impose une ligne éditoriale conforme à la voix du maître, aujourd’hui incarnée par le colonel Assimi Goita et ses compagnons d’armes.
En effet, ceux qui ont refusé de suivre les sentiers battus soigneusement tracés par la junte militaire au pouvoir sont désormais tombés dans le collimateur des militaires qui ne lésinent pas sur les moyens afin de leur imposer une « conduite exemplaire » à tenir.
C’est ainsi que le journaliste Aliou Touré, directeur de publication du journal « Le démocrate » qui lors d’une conférence de presse avait réclamé la libération de son confrère Mohamed Youssouf Bathily, dit Ras Bath, inculpé et écroué le 13 mars après avoir déclaré que l’ex Premier ministre Soumeylou Boubeye Maiga a été assassiné, s’est trouvé aussi sous les menaces de la junte. Après la conférence de presse, le journaliste Aliou Touré révèle qu’il avait été enlevé par des hommes cagoulés et conduit à une destination inconnue jusqu’à sa libération. Le président de la maison de la presse a décrié ce comportement qui n’honore par l’État et plus précisément les dirigeants actuels du Mali.
Pour lui, c’est la meilleure manière de véhiculer une mauvaise image du pays à l’étranger. Quoiqu’il en soit, c’est l’Etat malien chargé de sécuriser les citoyens du pays, qui sera tenu pour responsable d’un tel acte pour le moins grave.
Le barreau du Mali n’est pas resté insensible à cette affaire en déclarant qu’il « exhorte l’État à se conformer à ses engagements » et de préciser que « toute personne privée de liberté » ne peut être « gardée que dans des lieux de détention officiellement reconnus et doit être présentée à un magistrat compétent dans un délai prévu par la Constitution du Mali ».
Le journaliste a été porté disparu depuis le jeudi passé, mais retrouvé « sain et sauf à Bamako le dimanche passé », selon la cellule de crise mise en place par ses confrères après sa disparition.
Ce climat délétère qui caractérise désormais l’exercice du métier des journalistes de la presse indépendante au Mali, suscite désormais des critiques de plusieurs associations dont l’ONG Reporters sans frontières, qui a fait part des véritables difficultés que rencontrent ces journalistes dans un environnement désormais hostile à la liberté d’expression.
On ne saurait s’attendre à une meilleure situation sous un régime d’exception, qui ne pourra pas faire exception au principe sacro-saint de toute dictature qui est de nature à réduire au silence toutes les voix discordantes au régime.
ABOUBACAR SOUMAÏLA