Le vent violent des coups d’État vient-il d’abattre le gros baobab au pouvoir au Gabon? Assiste-t-on irrémédiablement à la fin de la dynastie Bongo installée d’une main de fer depuis l’avènement de Bongo-père, il y a de cela près de 60 ans ? Des interrogations légitimes qui font suite à l’annonce d’un coup d’État au pays d’Ali Bongo avec l’avènement d’une nouvelle junte dont le message à la nation annonce en substance la fin du régime.
Ce groupe d’officiers supérieurs de l’armée gabonaise justifie cet « acte patriotique » par l’absence du manque de crédibilité des récentes élections générales, dont les résultats très contestés annoncent la victoire du président Ali Bongo à l’élection présidentielle contre toute attente. Les putschistes à l’instar de leurs récents prédécesseurs dans les pays comme le Mali, le Burkina Faso et le Niger annoncent aussi des mesures telles que « la fermeture des frontières jusqu’à nouvel ordre » « l’annulation des élections générales » et enfin la « fin du régime ».
L’axe Mali-Burkina Faso-Niger vient de recevoir un précieux renfort, en affaiblissant considérablement la France qui désormais évolue dans un contexte très difficile à gérer, un véritable malaise d’autant plus que le régime Bongo incarnait le cœur de la France-Afrique depuis l’indépendance. La main mise sur le Gabon par la famille Bongo, malgré les multiples élections générales contestées depuis belle lurette, en témoignent celles plus symptomatiques de 2016 qui étaient émaillées de violences n’ont malheureusement pas pu servir au clan Bongo de vite se retirer du pouvoir avant la catastrophe.
On avait pourtant espéré que l’état de santé d’Ali Bongo, d’ailleurs très déclinant provoque en lui un déclic, une quinte de sagesse l’amenant à revoir sa copie, pour une sortie heureuse par la grande porte. Mais hélas, comme le dit le philosophe Allemand Hegel « de l’histoire, nous apprenons que nous n’en apprenons rien », ce qui se confirme avec l’amnésie dont font souvent preuve nos hommes politiques qui en réalité ne se comportent pas en véritables hommes d’État.
Les observateurs avertis de la politique africaine, soucieux de l’émancipation des populations du continent attendent cette fois-ci de pieds fermes la réaction de l’Elysée dont la dernière sortie fracassante du président Macron a consisté à maintenir le rejet des nouvelles autorités militaires nigériennes, en usant des propos empreints de menaces et surtout d’une arrogance jamais égalée.
Certes, on imagine déjà le discours mitigé de l’Elysée qui va s’accentuer sur la différence des contextes en vue de ne pas faiblir face au Niger dont la « France sera intraitable » vis à vis du général Tiani et de ses camarades. Une posture très gênante pour Emmanuel Macron dont le discours est déjà traité par les détracteurs de la politique française de « deux poids deux mesures », marquant ainsi une véritable incohérence des réactions de la France par rapport aux différentes crises en Afrique.
Le général Tiani peut-il tirer profit de cette conjoncture à première vue favorable ? La réponse paraît difficile à l’évidence, mais on a la certitude que la France et ses alliés qui depuis l’avènement du coup d’État au Niger tirent à boulets rouges sur les militaires, se trouvera considérablement affaiblie.
Macron aura réagir nécessairement sur la situation au Gabon tout en ajustant sa position, au risque de tomber dans le piège d’une diplomatie à géométrie variable, véritable reproche de nombreux africains fait à la France qui par ses critiques brille surtout par son incohérence manifeste en lui ôtant désormais toute crédibilité dans ces nombreux pays jadis considérés comme des territoires conquis. Au Gabon, Brice Clotaire Oligui Nguema est un homme puissant, très puissant.
ABOUBACAR SOUMAÏLA