Macron, l’africain !
De la Guinée-Conakry au Mali, en passant par le Burkina Faso, du Gabon au Tchad, en passant par le Niger, la France a aimé et haï en même temps, des dirigeants militaires et civiles, en installant certains personnellement au perchoir (pouvoir) comme au Tchad, en restant souple avec certains et en refusant avec violence et mépris d’autres au gré de son choix, dont seul l’Elysée connait le secret comme au Burkina Faso, au Mali ou au Niger. La France a fait et a défait des régimes en Afrique et au Sahel, au gré de ses propres choix, sans tenir compte de ceux des populations.
Le jeune président français Emmanuel Macron a réagi vigoureusement du haut de son paternalisme comme à ses habitudes, face au coup d’Etat du Niger exactement comme un chef de famille à l’égard de ses enfants. Macron a grondé aux Chefs d’Etat alliés de la région Cedeao comme un vieux père Africain devant à ses enfants, en leur tirant les oreilles, avant de leur indiquer le sort qui les attend, à chacun d’entre eux, si jamais ils n’arrivent pas à stopper net ce qui s’apparente à une véritable épidémie de putschs en Afrique.
Deux jours seulement après cette furieuse sortie médiatique du président français Emmanuel Macron devant les ambassadeurs, la France a désormais un autre putschiste à « abattre », après Assimi Goïta, Ibrahim Traoré et Abdouramane Tiani, en l’occurrence le général gabonais Brice Oligui Nguema, en cet autre mercredi dédié encore aux coups d’État en Afrique. La prise du pouvoir au Gabon par un autre coup d’Etat militaire a permis à l’Afrique de réaliser une plus grande Remontada en termes de coups d’Etats depuis la grogne de Paris !
Que fera Macron maintenant ?
Entre les options toutes deux complexes de la fermeté et de la guerre, le président français Emmanuel Macron a certainement raté le coche pour faire face aux coups d’Etat qui prennent de plus en plus de l’ampleur en Afrique de l’Ouest et avec le putsch intervenu au Gabon, ce mercredi 30 Août 2023. Mais, il faut redouter l’entrée de l’Afrique Centrale dans le printemps des coups d’Etat avec cette prise du pouvoir au Gabon. Car ni la politique dite de fermeté basée sur les menaces de violences ni la guerre avec ses conséquences dévastatrices ne peuvent justifier d’une efficacité certaine pour dissuader les armées africaines à prendre le pouvoir, d’autant plus qu’elles sont actuellement en bonne harmonie avec les populations éprouvées, frustrées et récoltées contre les pouvoirs civiles, laxistes à l’égard des groupes armés terroristes, en apparence.
Partout en Afrique, l’arrivée des forces de défense et de sécurité au pouvoir est saluée comme une belle opportunité d’en découdre avec la violence terroriste au Sahel ou la dictature en Afrique Centrale, tout comme la mauvaise gouvernance politique, économique et sociale dans d’autres pays, où les démocraties sont bafouées, les droits essentiels de l’homme piétinés et la presse muselée.
Et le dialogue politique ?
Il n’y a pas meilleure vertu que celle du dialogue ou encore de la médiation aussi bien en période normale qu’en période de crise politique. C’est pourquoi, au lieu de comprendre les crises en Afrique et d’aider à les juguler avec des prophylaxies proactives, la France s’enfonce aussi bien dans approche erronée que dans une posture inconfortable de diplomatie en décadence, contrairement à ses alliés Américains et Allemands dans la région du Sahel.
Le Gabon qui réalise son premier coup d’Etat de l’Histoire a déjà quitté la Francophonie pour le Commonwealth par échec certainement de la diplomatie française, la 3è la plus influente au monde il y a peu. Si Emmanuel Macron ne comprend toujours pas qu’il doit assumer ce qu’il a créé en Afrique, il y a peu, en ordonnant le président Roch Marc Christian Kaboré à aller allumer le feu dans une salle d’amphithéâtre de l’université de Ouaga et ce, devant des centaines d’étudiants, il risquera d’être tard pour la France, qui se réveillera un jour trouver que toutes ses colonies d’Afrique fêtent à la table de Vladimir Poutine, pendant que la jeunesse africaine maudisse la France et ses intérêts malsains sur le continent.
MOUSSA NAGANOU