Le Cameroun, pays alors considéré comme un havre de paix est encore épinglé par des questions de droits de l’homme dans la région de l’extrême-Nord. Le pays est marqué par une spirale de violences depuis, avec l’avènement du groupe terroriste Boko Haram qui tout en sévissant dans un premier temps au Nigeria voisin a réussi à étendre ses tentacules au Nord du Cameroun.
Depuis lors, on enregistre des violations massives de droits de l’homme allant du viol aux meurtres arbitraires. Malgré les actions déployées par l’État du Cameroun afin de sécuriser la région, les exactions sont devenues courantes et le désarroi des populations est de mise au regard des enquêtes et autres investigations qui visent à apporter un éclairage sur la vie des populations afin d’alerter les autorités camerounaises à ce sujet.
C’est dans cette optique que deux organisations ARHU et ASPDE dont le but est de protéger les droits humains publient régulièrement un rapport sur la situation sécuritaire des populations du Nord-est du Cameroun. Le rapport de Juin 2023 révèle des faits de violations de droits de l’homme essentiellement perpétrés par la nébuleuse Boko Haram bien que divisée en deux courants depuis 2016.
Le groupe terroriste à l’instar d’autres mouvements qui répandent la terreur dans certains pays comme le Burkina Faso s’est adapté aux réactions de l’Etat en déployant des stratégies plus criminelles, notamment par l’utilisation des engins explosifs qu’ils réussissent à fabriquer sur place. Les engins explosifs improvisés (EEI)utilisés par plusieurs factions de Boko Haram sont devenus les armes les plus meurtrières contre les populations.
L’une des principales recommandations de ce rapport concerne la stratégie de déminage « la lutte contre les EEI est une dimension clé de la stratégie contre l’extrémisme violent. Il est temps que les FDS mobilisent plus que dans le passé les compétences en matière de déminage. Les unités de déminage doivent procéder au renforcement de capacité en la matière, à travers des formations supplémentaires. Il leur est vivement recommandé le partage d’expériences avec leurs homologues du Nigéria, mieux expérimentés en raison des opérations de contre-offensives qu’ils mènent régulièrement ».
Le pays de Paul Biya connait à l’extrême Nord de son territoire l’épanouissement d’un « no man’s Land », qui défie l’État. Un élément essentiel de lutte contre le terrorisme est mis en avant dans cette recommandation en l’occurrence le partage d’expérience des armées nationales, la mutualisation des forces et aussi la mise en commun de stratégies militaires visant à mieux lutter contre le terrorisme.
Au delà de l’insécurité grandissante qui caractérise cette région du Cameroun avec dans son sillage le nombre ahurissant de cas de violations de droits de l’homme, c’est aussi l’impérieuse nécessité d’être présent sur les lieux afin de ne pas abandonner les populations aux bandits de tout acabit. On comprend dès lors que l’absence de force tampon comme la Minusma au Mali pourrait offrir un champ libre aux terroristes qui allègrement occuperont le terrain au détriment du bien-être des populations.
C’est donc une marque de couardise voire d’irresponsabilité que d’abandonner les populations à leur sort. On comprend le malaise suscité par la demande du Mali de faire retirer la mission onusienne de la Minusma qui ferait inévitablement le lit à l’insécurité.
Le Cameroun à l’instar de nombreux pays africains n’arrive plus à résoudre l’épineux problème de l’insécurité du Nord-est, c’est une véritable alerte lancée aux pays voisins afin de mutualiser leurs forces. Le rapport, malgré les révélations troublantes de violations de droits humains nous renvoie à entretenir la confiance vis à vis du Cameroun qui devra être au cœur des stratégies de sécurisation de ses populations. « Le Cameroun, en tant qu’Etat de droit et disposant des prérogatives à travers ses démembrements, demeure l’ultime espoir des communautés pour braver les exactions sociales, tout en espérant que ce modeste rapport contribuera à rétablir la sécurité et le respect des Droits de l’Homme dans la région de l’Extrême-Nord ».
ABOUBACAR SOUMAÏLA