Débutée, le 1er Mars 2023 par le Gabon, la tournée africaine d’Emmanuel Macron s’est achevée, le samedi 4 du même mois, par la République Démocratique du Congo (RDC). Accueil sobre mais tapis rouge pour le président français qui reste, en dépit de malentendus sur divers sujets, avec certains de ses hôtes, un visiteur de la plus grande estime.
Sans tambours ni trompettes
Plus de ces accueils festifs, ainsi se veulent désormais les civilités africaines à l’endroit de la France. D’ailleurs, dans un contexte marqué par le sentiment de rejet manifeste de l’ancien colonisateur sur le Continent à travers tant de discours souverainistes qui fascinent les masses paupérisées prêtes à la révolte.
Quel est ce Chef d’État africain qui va oser caresser dans le sens des poils, le président français ? De Libreville à Kinshasa, en passant par Brazaville (l’autre Congo) et Luanda en Angola, il n’y a pas un seul endroit où l’on n’ait entendu des voix de l’Opposition et/ou de la société civile pour dire « non à la venue d’Emmanuel Macron » alors même qu’auparavant, en pareille occasion, tout ce beau monde se bousculait pour exposer ses problèmes au « mécène français ». Lui-même, Emmanuel Macron ne s’attendait pas à plus que le tapis rouge. Le contexte tendu de la relation franco africaine ne prête pas à trop d’expositions. Bien plus, le jeune président français est du genre à bousculer les traditions diplomatiques d’antan, en préférant des formats loin des grandes solennités.
Des échanges décomplexés, sans tabous, ni langue de bois
Si chez le Gabonais Ali Bongo, le Congolais Dénis Sassou N’Guesso et l’Angolais Joao Lurenço, il n’y a pas eu de sujets qui fâchent, ou disons qu’Emmanuel Macron et ses hôtes ont eu des tons diplomatiques sur les points discutés, aussi épineux soient-ils, la conférence de presse conjointe qu’il a animée avec Félix Tshisékedi à Kinshasa fut très houleuse.
On ne pouvait pas ne pas s’attendre à des échanges tendus entre les deux hommes. En partant de la logique que « l’ami de mon ennemi est mon ennemi », le président de la RDC ne verrait pas d’un bon œil la bonne santé de la relation franco-rwandaise. Et, à cette occasion, il n’est pas passé par quatre chemins pour pointer, à nouveau son doigt accusateur sur son voisin (le Rwanda) dans le malheur qui frappe son pays, allusion faite à la rébellion du M23 qui bénéficierait, selon lui, du soutien de Paul Kagamé.
Aussi, répondant à la question d’une journaliste française, en a-t-il profité pour tacler son visiteur, comme quoi l’ère de la Françafrique est révolue et fera place à celle du respect mutuel. Réponse du berger à la bergère ; à son tour Emmanuel Macron ne s’est pas fait prier pour piquer son hôte là où ça fait mal, notamment que la France n’est en rien responsable de l’incapacité des dirigeants de la RDC à assurer la souveraineté sur l’ensemble de leur territoire ou l’impunité dont continuent de jouir certains criminels de guerre au sein de l’appareil d’État congolais.
A chacun sa démocratie !
Sur la situation démocratique du Continent en général, objet de tant d’accusations à l’endroit de la France qui adouberait des potentats, le président français a tenu à tracer la nouvelle ligne de démarcation de la relation franco-africaine. A chacun sa démocratie ! C’est cela la quintessence de son message. Une façon de dire qu’il n’appartiendra plus à la France de venir donner des leçons de démocratie sur le Continent africain ou d’imposer aux africains ce qui relève de leurs choix.
Vue sous un angle historique, cette tournée africaine d’Emmanuel Macron, la 2è du genre depuis sa réélection en 2022, peut être considérée décisive de la relation franco-africaine, qui ne sera plus comme auparavant. C’est le temps de grandes leçons à tirer de part et d’autre de la Françafrique.
OUMAROU KANÉ