La presse indépendante subit toujours plus de pressions depuis l’insurrection jihadiste, suivie des deux coups d’Etat. Celui d’Ibrahim Traoré en particulier, en septembre 2022, l’a mise sous cloche. «Site web en maintenance.» «Not found.» Telles étaient les mentions placardées en pages d’accueil des journaux d’investigation burkinabè l’Evénement et le Reporter, le 10 juillet. Ces médias sont la cible d’une deuxième salve de cyberattaques en deux mois. Elle coïncide avec la parution d’un nouveau numéro du bimensuel l’Evénement. En une, le portrait d’un lieutenant aux traits juvéniles décédé dans une embuscade tendue par des groupes jihadistes dans la région de l’Est. Du moins, officiellement. Car le journal creuse «la piste d’un assassinat simulé» de cet officier au CV prometteur, jusqu’à ses désaccords avec la stratégie militaire du régime d’Ibrahim Traoré, partagés avec un camarade sur WhatsApp et probablement interceptés.
Un choix d’enquête hardi. Mais assumé par l’Evénement, qui a érigé en slogan la formule : «L’information est un droit.» Ce droit s’est pourtant érodé au fil du conflit qui a fait environ 14 000 morts depuis 2018, conduisant de nombreux médias à revoir leurs pratiques. Graduellement, l’accès aux sources officielles s’est restreint, les injonctions des autorités à «ne pas faire le jeu des terroristes» se sont répétées. Puis, avec la prise de pouvoir d’Ibrahim Traoré à l’issue du coup d’Etat, la situation s’est empirée.