A l’heure du bilan, on est en droit de se poser sans complaisance une telle question au regard de la détérioration de la situation sécuritaire des populations de ces deux pays.
Le Mali à ce jour ne contrôle qu’un pan de son territoire, de même que le voisin burkinabè. Le départ demandé aux forces françaises par les deux juntes militaires au pouvoir dans ces deux pays était perçu comme la reprise en main de la situation sécuritaire, qui a porté les militaires au pouvoir. Le Mali et le Burkina Faso défendent donc bec et ongle par ces agissements leur « souveraineté nationale », tant prisée par les nouveaux défenseurs du départ définitif de la France du continent africain, pour qui la France constitue la boîte de Pandore, d’où sortent tous les maux qui assaillent les africains.
Aussi, les autorités burkinabè « timorées » aux premières heures de leur prise du pouvoir ont au fil du temps dévoilé leur « agenda caché », vis à vis de la France. Cette fois-ci, la position du capitaine Traoré est définitivement ancrée dans le marbre, l’intention de rompre d’avec la France est désormais une réalité palpable, qui s’impose aux observateurs les plus septiques qui avaient douté jusque-là, de la fermeté de la junte militaire au pouvoir.
Depuis le départ des troupes de la base française Sabre, considéré comme un coup de semonce à l’Élysée, et de la volonté surtout des autorités maliennes et burkinabè de faire de leur deux pays une fédération, on avait compris que le rapprochement était très avancé entre le capitaine Ibrahim Traoré et le colonel Assimi Goïta.
Mais, c’est la visite du Premier ministre malien Choguel Maiga à Ouagadougou venu faire du coaching au voisin burkinabè durement frappé par les attaques récurrentes des terroristes, qui a surtout précipité les évènements au pays des hommes intègres.
Ce n’est donc plus surprenant que le Burkina Faso emboîte le pas au Mali en demandant le départ du personnel militaire français en «assistance technique», en dénonçant l’accord de 1961.
C’est une autre démonstration du rattachement à la «souveraineté nationale », pierre angulaire de la propagande populiste, propre désormais aux régimes qui ont fait allégeance à la Russie. Dans les faits, cela se traduit par des appuis financiers, matériels et des formations ponctuelles à l’armée burkinabè que le capitaine rejette en bloc.
La junte militaire burkinabè fait désormais confiance à son armée, ses VDP et aussi aux partenaires prêts à voler à son secours en lui livrant notamment des armes pour mener le combat contre le terrorisme, sauf la France. C’est désormais un secret de polichinelle que de comprendre que ce partenaire soit aussi la Russie.
L’effet contagion du Mali nous inspire profondément à penser que le Burkina Faso est définitivement tombé dans l’escarcelle russe. Les autorités burkinabè avaient précisé que la fin de la coopération militaire ne marque pas la fin des relations diplomatiques avec la France. C’est un fait que le mentor malien voué à la cause russe a abattu un travail d’Hercule en recrutant ce nouveau venu jadis velléitaire dans son choix en faveur de la rupture d’avec la France.
On connaît la suite du communiqué comme ce fut celle du départ de la Force Sabre. Le Burkina Faso dira sûrement que cette décision historique de grande portée ne signifie pas la fin de la coopération avec la France. Pour rester cohérent avec leur souveraineté nationale tant prônée par les autorités maliennes et burkinabè, la meilleure démonstration du rejet de la France serait la création de sa propre monnaie, en coupant définitivement le cordon ombilical avec le franc CFA, preuve que l’enfant a grandi, une monnaie dans laquelle le capitaine Traoré ne se reconnaitrait plus.
Cette étape sera la preuve la plus émouvante de l’affranchissement du Mali et du Burkina Faso de la tutelle française. Sinon, tout autre comportement frise le populisme voire le mensonge offert aux pauvres populations, en quête de subsistance, mais malheureusement acculées par les attaques terroristes.
Mais si déjà l’Élysée a décidé de changer de mode de coopération avec les pays africains, il serait un leurre de penser qu’il reste encore chez les autorités Burkinabè une volonté de coopérer encore avec la Métropole.
Dans les faits, la France ne se fait plus d’illusion, c’est pourquoi elle s’attelle à reconstruire un nouveau cadre de coopération assumée avec l’Afrique, un cadre débarrassé de toutes les anciennes « plaies béantes», qui sont aujourd’hui exploitées avec beaucoup de surenchère par les nouveaux « panafricanistes » au bénéfice du challenger russe, en terre africaine.
ABOUBACAR SOUMAÏLA