Repris le jeudi 19 janvier 2023, le procès du coup d’Etat avorté dans la nuit du 30 au 31 mars 2021 s’est poursuivi le lendemain (vendredi 20 janvier 2023) au tribunal militaire installé dans l’enceinte du camp de la gendarmerie de Koiratégui. Durant ces deux jours, plusieurs révélations ont été faites.
Parmi les 58 accusés appelés à comparaitre, plusieurs sont passés à la barre. Ce qui a permis de voir clair dans les motivations des putschistes, le schéma de l’opération, les causes de l’échec de cette tentative du coup d’Etat et les complicités dans la hiérarchie militaire. Tout de même, il y a encore des zones d’ombre. Y-a-t-il une partie civile dans cette affaire ou une main extérieure ? C’est là une question et bien d’autres qui trouveront certainement leurs réponses à l’issue du procès.
Plus l’ombre d’un doute : Il s’agit bel et bien d’une véritable tentative de coup d’Etat
A la reconnaissance des faits par le cerveau présumé du coup d’Etat, à savoir le capitaine Sani Gourouza, à l’entame du procès le 13 décembre dernier, d’autres révélations et témoignages sont venus confirmer qu’il s’agit bel et bien d’une véritable tentative de coup d’Etat. Ce qui vient conforter les suppositions de plusieurs observateurs au lendemain de l’annonce faite par le gouvernement de l’échec d’une opération de remise en cause de l’ordre constitutionnel par des militaires de l’armée nigérienne.
Des très fortes implications au niveau de la hiérarchie militaire
L’ex chef d’Etat-major de l’Armée de Terre, le Général Seydou Bagué et le patron des opérations militaires des forces armées nationales le Colonel-major Djibo Hammadou par exemple ont été cités comme étant dans le complot. Même si le premier a nié les faits, les faits tels que présentés lors du procès l’accablent. Y-a-t-il d’autres implications dans cette hiérarchie ? Vraisemblablement, tout n’a pas été encore dit à ce niveau. La suite du procès nous édifiera.
Des motivations politico-politiciennes dans cette tentative de remise en cause de l’ordre constitutionnel
Faire tout pour renverser le régime avant la validation des candidatures à l’élection présidentielle du 27 décembre 2020. A défaut comme ce fut le cas, interrompre le processus démocratique avant la passation des pouvoirs entre le président Issoufou Mahamadou et son successeur Mohamed Bazoum. Ce schéma est en harmonie avec l’agenda d’une certaine opposition qui a appelé à l’insurrection au lendemain de la proclamation de la victoire de Mohamad Bazoum à l’issue du second tour de l’élection présidentielle tenu le 21 février 2021. Pour autant, pour l’heure, il n’y a eu aucune révélation quant à une quelconque complicité dans les milieux des adversaires politiques. La suite du procès établira-t-il le lien ?
Le schéma de l’après coup d’Etat s’il venait à réussir
Il s’agit de mettre en place une transition militaire, de former un gouvernement de 15 membres, de chasser la France du Niger et de nationaliser les compagnies minières françaises. On est ici dans une inspiration à la malienne, c’est-à-dire le schéma populiste des ‘’hommes forts’’ de Bamako. Faut-il croire qu’il y a une main extérieure dans cette affaire et le Niger n’est pas passé loin d’un débarquement sur son territoire du groupe paramilitaire privé russe Wagner ?
Cause principale de l’échec du coup d’Etat : des unités militaires attendues n’étaient pas au rendez-vous
Si le coup d’Etat du capitaine Gourouza et consort n’avait pas réussi, c’est parce que le plan prévu n’a pas fonctionné. Le plus important des éléments attendus de l’opération Almahou positionnée dans la zone de Ouallam (région de Tillabéri) n’était pas au rendez-vous ainsi que d’autres prévus pour certains points stratégiques. En fait, il y a eu fuite, certains officiers supérieurs contactés ayant vite fait d’informer la hiérarchie militaire qui semble avoir laissé faire les choses pour prendre cette fois les putschistes la main dans le sac. C’est ce qui fut fait.
N.B : Tous les prévenus sont présumés innocents jusqu’à ce que leur culpabilité soit établie par le tribunal militaire
OUMAROU KANE