La question de l’avènement d’un sénat au Niger traverse les rues de Niamey, la capitale nigérienne et fait son petit bon homme de chemin sous forme de débat public dans toutes les sphères de la société. Mais en l’absence d’une étude déclinant les enjeux d’une telle institution législative ou de toute forme des données statistiques sur le sujet, la classe politique demeure encore dans un silence de cimetière sur la question. L’avis d’un spécialiste compte.
Le Niger passe déjà pour un laboratoire d’analyses et d’expérimentation des institutions à caractère républicain mais surtout celles fondées sur l’utilité et la nécessité pour améliorer la qualité de la gouvernance. D’autant qu’aujourd’hui, c’est de la qualité de la prestation du service public au profit des citoyens dont il est question pour apporter une meilleure gouvernance au monde, mais au Niger c’est plutôt le renforcement de l’unité nationale et de la cohésion sociale qui est de mise.
Après 3 décennies d’errements de son système démocratique à la recherche de ses marques, le Niger avait pourtant tout essayé, en vain. Après le retour du multipartisme dans les années 1990, le choix de la nature du régime n’a pas été difficile pour le pays de Mahamane Ousmane, de Baré Maïnassara, de Daouda Mallam Wanké, de Mamadou Tandja, de Salou Djibo, d’Issoufou Mahamadou ou de Mohamed Bazoum.
En cause, le pays longtemps gouverné tout de même par des dignes fils comme Hamani Diori, Seyni Kountché ou encore Ali Chaïbou avait laissé des stigmates de la gouvernance d’hommes forts au détriment des institutions fortes. Ainsi, les grands débats de la conférence nationale souveraine dont les souvenirs restent encore frais dans la mémoire du spécialiste en science politique Dr Aboubakary Moukimou Mourana, l’on retient que « les dirigeants nigériens ont longtemps fait fi des expériences de l’histoire de leur pays, par négligence ou par erreur».
Selon lui, la 4è République du président Ibrahim Maïnassara Baré et la 6è République de Mamadou Tandja avaient manqué tout simplement de consensus politique fort pour se stabiliser le régime « présidentiel » au Niger puis produire leurs effets et générer leurs expériences méritées. Ce qui justifie le retour récurrent du régime semi-présidentiel, chaque fois, même après des ruptures constitutionnelles par l’irruption des militaires sur la scène politique.
La nécessité de l’institution d’un sénat au Niger doit être pensée en dehors des considérations budgétaires ou budgétivores mais en privilégiant son apport à une gouvernance efficace et efficiente, en tant que surtout une seconde chambre législative. A l’époque actuelle marquée par un monde ultramoderne avec des phénomènes sociaux nouveaux à réprimer ou à encadrer efficacement, si une seconde chambre législative peut venir préserver les valeurs humaines, celles socioculturelles et économiques, le sénat nigérien est la bienvenue dans un contexte de recherche de sécurité. La pertinence d’un sénat au Niger ? Et donc, pourquoi en faire ? (A suivre).
Dr ABOUBAKARY MOUKIMOU MOURANA