Le vendredi 26 Mai 2023 s’est tenu dans les locaux du restaurant Tabakady à Niamey un déjeuner de presse organisé par le réseau des journalistes pour les droits de l’homme au Niger (RJDH) sur le thème : « la cybercriminalité et la liberté de presse ». Le phénomène de cybercriminalité est né de l’explosion des réseaux sociaux, avec pour conséquence l’accès et la diffusion d’une quantité d’informations qui circulent à une vitesse vertigineuse via des utilisateurs peu soucieux de la fiabilité des sources.
Ce nouveau contexte ne peut échapper aux hommes de médias qui ne pourront pas faire l’économie de ces sources d’informations, au risque de voir leurs informations devenues obsolètes. C’est donc face aux dangers inhérents à ces nouveaux procédés d’accès à l’information pour l’homme de média, qu’il paraît utile, voire indispensable que ce dernier soit assez outillé pour mieux appréhender ce monde plein d’opportunités mais aussi de dangers réels. C’est pour éclairer la lanterne des journalistes invités à ce forum qu’un panel constitué des experts comprenant un magistrat en l’occurrence monsieur Nani Soly Aboubacar, un journaliste comme monsieur Ismael Sallaou, conseiller au Conseil supérieur de la communication (CSC).
Le magistrat a d’entrée de jeu présenté l’historique des lois en lien avec la cybercriminalité et aussi son cadre juridique. Il a révélé que les lois sur la cybercriminalité sont sorties du même moule que celles sur le terrorisme en 2015 dont le contexte sécuritaire avait contraint le législateur à prendre des mesures adéquates pour mieux encadrer et lutter contre le terrorisme.
C’est en 2019, que la loi sur la cybercriminalité a été adoptée mais son aspect de « dépénalisation » qui manquait au texte avait provoqué une levée de boucliers dans le monde de la presse dont le lobbying avait abouti en 2022 à la révision de cette loi, en réduisant uniquement les peines aux amendes. Toutes les modifications apportées à la loi relative à la cybercriminalité ne conduisent plus à la prison mais exposent à des amendes dont les montants élevés ont été soulignés par les participants, d’autant plus que les médias vivent d’habitude une véritable tension de trésorerie qui ne leur permettra pas de faire face aux amendes prévues par la loi. Les journalistes sont insolvables aujourd’hui, au regard de la « santé financière » des entreprises de presse nigérienne.
Le magistrat Soly a tenu à préciser que bien que votée la loi n’a pas été publiée dans le journal officiel encore, elle est donc de ce fait inopérante. Il a conseillé aux participants de veiller à la publication de cette loi dans le journal officiel et de continuer à faire du lobbying pour une révision des montants jugés élevés des amendes.
Ensuite, ce fut au tour des participants de prendre la parole pour contribuer à travers des questions aux experts qui les ont édifiés et surtout attiré leur attention sur les dangers tapis dans la « Toile » de la loi. En effet, les réseaux sociaux ont permis la libération de l’expression de tout citoyen, même celui totalement étranger à la déontologie journalistique indispensable à tout professionnel du métier.
Une rencontre très enrichissante dont le contenu selon certaines recommandations devrait se retrouver dans un guide afin de servir de repère aux professionnels du métier. Enfin, il a été vivement recommandé de renouveler de telles initiatives ou d’inviter des experts au sein des médias, en vue d’imprégner les journalistes aux arcanes de ce vaste labyrinthe que constituent les réseaux sociaux. Ce forum a été réalisé grâce à l’appui financier l’agence américaine de promotion des droits de l’homme (USAID).
ABOUBACAR SOUMAÏLA