Le terrorisme au Niger connait un recul indéniable et son essoufflement est perceptible à travers les données en lien avec les attaques sur les terrains. On a beau parler de la stratégie de la lutte antiterroriste du Niger orientée essentiellement vers une approche holistique, qui intègre toutes les dimensions, voire les variables qui entrent en compte dans l’épanouissement du phénomène terroriste, ce discours paraîtra creux aux yeux des observateurs qui exigent les retombées probantes d’une telle approche sur le terrain.
Aussi, pour mieux mesurer l’efficacité d’une stratégie, il faut définir clairement le phénomène en question et circonscrire les éléments clés en lien avec son rythme et sa proportion, c’est à dire l’augmentation ou la diminution des conséquences inhérentes au phénomène. En l’espèce, il s’agit bien entendu du terrorisme, qui depuis maintenant plus d’une décennie a semé la désolation dans certaines régions du Niger au point d’affecter la vie des populations qui étaient obligées d’adopter de nouvelles stratégies de survie.
Certes, le terrorisme au Niger n’a pas la même emprise sur les régions où il tente d’établir sa terreur. Les cas par exemple de Diffa et de Tillabéry continuent de préoccuper les autorités nigériennes. Celles-ci leur ont réservé un traitement spécial au fur et à mesure des attaques et menaces qui continuent heureusement aujourd’hui dans une moindre mesure de hanter les populations de ces régions.
Une analyse et une interprétation des données du rapport de CNAP-Niger révèle de précieux enseignements sur les effets de la mise en œuvre stratégie antiterroriste du Niger de façon très précise. Ces données sont issues des directions compétentes des ministères en charge de la sécurité (DSP/DGPN) et de la défense nationale (DIRPS/EMA). Pour les rendre plus précises, elles ont fait l’objet de confrontation avec celles de la plate forme ECOWARN de la CEDEAO.
Elles s’étalent sur une période moyenne dont les premiers semestres 2021, 2022 et 2023 correspondent à l’intensification des actions de lutte contre le terrorisme au Niger par l’armée nationale soutenue aussi par les armées partenaires dont notamment les forces françaises et européennes. Ces actions ne se confinent pas au tout militaire mais sont soutenues parallèlement par un volet social et surtout une véritable approche politique assortie du dialogue avec les communautés vulnérables afin d’aider à ramener les personnes enrôlées dans la République, en les y réinsérant dans une construction commune de la Nation nigérienne.
Deux conclusions majeures ressortent de l’analyse de ces données. Primo, le Niger a enregistré une baisse de victimes pendant ces périodes citées et secundo, le terrorisme s’est métamorphosé en banditisme dans certaines régions comme Mardi et Agadez, preuve éloquente d’une déroute de ces bandes armées qui, compte tenu de la pression exercée par les forces de l’ordre sur le terrain sont obligées de fuir leurs bases pour trouver refuge le petit banditisme, en attaquant les commerçants et autres opérateurs économiques.
Sans tomber dans des comparaisons bien que nécessaires, il serait utile de répliquer la même étude dans les autres pays du Sahel comme le Burkina Faso et le Mali en butte aussi aux attaques terroristes. Ainsi, on pourra mieux apprécier l’efficacité des stratégies concurrentes, notamment « celle du tout militaire » qui n’a pas encore permis la reconquête des territoires perdus au Burkina Faso et au Mali et celle qui privilégie une démarche holistique en implémentation au Niger dont les retombées positives de façon flagrante commencent à s’imposer même aux plus sceptiques.
Un résumé de ce rapport fait ressortir de façon claire les avancées significatives de la stratégie antiterroriste du Niger. « De l’analyse des données des premiers semestres 2021, 2022 et 2023, il ressort une évidence montrant que les populations civiles sont de plus en plus épargnées par les exécutions de masse commises en 2021 par les groupes terroristes affiliés à l’Etat Islamiques au Grand Sahara (EIGS ou ISWAP) ou au Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans (GSIM). Cette situation pourrait s’expliquer par l’effet cumulé de la présence permanente des Forces de Défense et de Sécurité dans les zones affectées et de la main tendue du Gouvernement pour une paix durable au Niger ».
ABOUBACAR SOUMAÏLA