L’offensive russe en Afrique est désormais, devenue une réalité palpable, qui se fait sentir auprès des autres partenaires traditionnels du continent comme les Etats-Unis d’Amérique, la Chine, la France ou encore l’union Européenne. Les récents événements au plan politique qui ont marqué le Mali et le Burkina Faso dont les dirigeants actuels sont issus des putschs viennent de raviver le débat sur la diversification des partenaires en Afrique.
On peut situer le regain d’intérêt de la Russie pour l’Afrique au début des années 2000 et coïncide avec l’avènement de Vladimir Poutine au pouvoir. Ainsi, en 2021, le président algérien Bouteflika en visite officielle en Russie signait déjà une déclaration de partenariat stratégique considéré comme le premier traité de ce type signé par la Russie avec un État africain.
L’influence de Moscou se manifestera aussi en Libye, notamment avec le partenaire russe Wagner dont les mercenaires prennent désormais part à la sécurisation de ce pays, affirme-t-on. Wagner est une société militaire spécialisée dans le mercenariat privé. Elle est gérée par l’oligarque russe Evgueni Prigojine très proche du président russe et considéré même comme le « cuisinier de Poutine ». Cette nébuleuse a marqué de sa présence lors de la bataille de Tripoli en 2019, le nombre de mercenaires russes aurait oscillé entre 1 000 et 2 000 membres au pays de Kadhafi.
L’intérêt pour la Libye est connu de tous. Ce pays représente en effet, une porte d’entrée sur le continent africain. Mais, le retour en force de la Russie sur le continent africain est marqué par le sommet Russie-Afrique, qui a réuni à Sotchi en octobre 2019 une quarantaine de Chefs d’État africains, a été perçu par beaucoup d’analystes comme la consécration du retour de Moscou sur le continent africain.
Ce fut la rampe de lancement du projet de conquête de l’Afrique. Ce sommet a suscité l’émergence d’une société civile africaine acquise à la cause russe, prônant un partenariat avec Moscou au grand dam des anciens alliés que sont la France, l’Angleterre, les Etats-Unis ou l’Union Européenne etc. Ce sommet a aussi abouti à la proclamation d’objectifs ambitieux et surtout à la signature de plusieurs traités bilatéraux. Selon la déclaration finale « 92 accords, contrats et protocoles d’accord […] d’une valeur totale de 1400 milliards de roubles » a été actée.
Au cours des cinq dernières années, la Russie a ainsi signé des accords avec une vingtaine de pays, les plus récents étant le Mali, la République du Congo et Madagascar. Ces accords prévoient en substance la formation d’officiers à Moscou, la livraison de matériels militaires, des exercices communs de simulation. Un regard minutieux et objectif sur les modalités de la coopération russe en Afrique permet de faire ressortir un fait récurrent : Moscou sous traite tous ses partenariats à travers Wagner et ce dans tous les domaines.
Certes, Wagner rime aujourd’hui avec le mercenariat, mais cette société excelle également dans bien d’autres activités en étouffant ses partenaires et favorise ainsi d’autres activités propices à l’encrage de l’empire russe en Afrique. Wagner s’impose donc comme le fer de lance de la stratégie de conquête de l’Afrique, à travers l’ingénierie développée et déployée dans plusieurs domaines, notamment la manipulation des consciences par le Web.
ABOUBACAR SOUMAÏLA