Au Mali, la junte militaire sous la férule du colonel Assimi Goita rencontre ses premières contestations sociales, depuis l’avènement de « l’espoir» incarné par les nouveaux messies du peuple. Après le triomphe qui a porté le colonel Assimi Goita au pouvoir, des voix discordantes commencent à se faire entendre dans un pays toujours en proie aux démons du terrorisme, malgré l’alliance avec la Russie dont le digne représentant est le groupe de mercenaires Wagner.
Après l’euphorie soudaine des promesses enflammées de libération totale du Mali des terroristes et selon Bamako de ses alliés français, l’heure est au bilan. Aussi, les deux objectifs assignés à la transition en l’occurrence, la sécurisation de tout le territoire et le retour à l’ordre constitutionnel normal exigé par la CEDEAO, devenu aujourd’hui la condition sine qua non de la réinsertion du Mali au sein des nations fréquentables.
Mais, les réalités du terrain ne contribuent pas à l’accélération du processus de reconquête des parties du pays« no man’s Land » dispersés ça et là sur l’étendue du territoire et surtout l’incapacité à déployer à temps, le processus électoral du fait de l’insécurité grandissante dans le Centre et le Nord du pays.
Malgré la « réussite » de la junte militaire malienne à museler la presse privée et aussi la société civile, certaines voix courageuses voire téméraires ont décidé de franchir le Rubicon, en vue d’être le porte parole des sans voix et les précurseurs d’une fronde sociale, et ce malgré les menaces récurrentes des autorités maliennes.
C’est dans cette lancée que Rokiatou Doumbia, influenseuse à l’honneur sur les réseaux sociaux maliens qui s’est fait remarquer pour sa lutte contre la vie chère, a eu maille à partir avec les autorités maliennes après la diffusion de vidéos au vitriol qui mettent à nu l’échec des militaires « sous votre gouvernance, ça ne va pas » et d’enfoncer le clou « cette transition est un échec ».
Rokiatou Doumbia, à cause de ce crime de Lèse-majesté est écrouée depuis le 15 Mars 2023 en attendant d’être jugée le 14 juin prochain. Outre la célèbre influenceuse, c’est au tour de l’animateur vedette de radiotélévision Ras Bath d’être dans le collimateur de la junte militaire malienne, suite aux propos jugés diffamatoires, selon lesquels Soumeylou Boubèye Maïga, ancien Premier ministre du Mali « n’est pas mort, il a été assassiné, c’est le terme qu’il faut ».
Cela lui a valu d’être placé sous mandat de dépôt le 13 Mars 2023 et son procès est prévu en mi-juin. C’est deux pionniers de la fronde sociale au Mali que sont Rokiatou Doumbia et Ras Bath ont ouvert un boulevard aux éventuels frondeurs, timorés et velléitaires incapables d’affronter les représailles de la junte militaire malienne au pouvoir. Ce sont surtout des partis politiques qui commencent à exprimer bien que timidement leur raz le bol, vis à vis du durcissement des militaires contre les libertés d’expression et en exigeant aussi le retour à l’ordre constitutionnel normal dont le préalable reste toujours la sécurisation de tout le territoire national.
C’est donc impérieux pour Assimi Goïta et sa troupe de trouver une solution dans les plus brefs délais avant le pourrissement avancé des rapports entre les gouvernants et les gouvernés. Une véritable quadrature du cercle, qui donne des fils à retordre à la junte militaire malienne qui devra vite se ressaisir avant l’amorce du déclin.
ABOUBACAR SOUMAÏLA