Le Chef de la junte militaire en Guinée-Conakry, le colonel Mamady Doumbouya, vient d’afficher sa position par rapport à l’avenir du pays qu’il dirige depuis le coup d’État perpétré le 5 septembre 2021 contre le pouvoir du président Alpha Condé.
C’est lors du lancement de la rédaction de la nouvelle Constitution un an et demi après le coup d’État que Mamady Doumbouya s’est engagé auprès des États Ouest-africains à rendre le pouvoir aux civils au bout de deux ans, à compter du 1er janvier 2023. Le colonel Mamady Doumbouya, réaffirme ainsi sa position de quitter le pouvoir après une « campagne d’assainissement » entreprise depuis son accession au pouvoir en Guinée Conakry, dont le procès du 28 septembre paraît emblématique.
La nouvelle constitution qui doit désormais régir la République de Guinée ne sera pas issue du modèle importé de la métropole, preuve d’une véritable singerie qui témoigne malheureusement de l’incapacité des guinéens voire des africains de penser par eux-mêmes. Selon le colonel Mamady Doumbouya, la nouvelle Constitution guinéenne doit refléter les aspirations profondes du peuple guinéen et ne sera en aucun cas taillée sur mesure à la faveur d’un quelconque homme politique.
Elle devra être le fruit d’une prospective proprement guinéenne, en accordant une place de choix aux générations futures. La satisfaction et les attentes de la postérité doivent être les objectifs à atteindre lors de l’élaboration de la dite Constitution. « Nous allons faire une Constitution qui résistera au temps et qui pourra être utile à nos enfants, affirme-t-il. Il ne s’agit pas de prendre la Constitution d’à côté et de la photocopier pour écrire une Constitution. Il s’agit, en tant que soldat, quand il y a problème, de trouver la solution», clame-t-il.
Au regard de la position ferme de la junte militaire guinéenne de remettre le pouvoir aux civils d’ici fin 2024, force est de constater qu’elle se démarque des deux autres juntes militaires malienne et burkinabè, qui s’enlisent quant à elles dans une lutte contre l’insécurité grandissante dans leur pays. Ces deux autres juntes militaires sont en effet, empêtrées dans une lutte édulcorée pour s’incruster au pouvoir, sous le prétexte de lutte sans merci contre le terrorisme, en remettant du coup, aux calendes grecques, toute idée de retour à l’ordre constitutionnel normal attendu par les citoyens et l’organisation communautaire, la CEDEAO. Le colonel Mamady Doumbouya se prépare ainsi à sortir par la grande porte de l’Histoire, grâce à cette fracassante annonce qui interpelle les dirigeants des deux autres juntes militaires au pouvoir au Burkina Faso et au Mali.
Il faut éviter de succomber à l’enlisement en reportant sine die son départ du terrain politique, au risque de confirmer les propos devenus d’actualité de Lord Acton (1834-1902). «Le pouvoir tend à corrompre, le pouvoir absolu corrompt absolument»!
Les arguments invoqués pour prendre le pouvoir par la force du colonel Assimi Goïta et du capitaine Ibrahim Traoré, en lien avec l’insécurité ne sauraient éternellement les couvrir pour s’enraciner au pouvoir. Par ailleurs, ces arguments sécuritaires ne tiennent plus la route, au regard de nombreux revers essuyés par les deux juntes militaires, notamment par la troupe du capitaine Ibrahim Traoré victimes d’attaques terroristes d’ampleur ces dernières semaines, établissant déjà un bilan provisoire de 78 soldats tombés.
ABOUBACAR SOUMAÏLA