Lundi 27 et mardi 28 février 2023, l’Intersyndicale des Travailleurs du Niger (ITN) et ses alliés ont mis en exécution leur menace d’aller en grève. Qu’en est-il du suivi de leur mot d’ordre ?
« Si les revendications sont légitimes, le suivi du mot d’ordre a été en deçà de l’effet escompté » ; fait observer ce gréviste militant du Syndicat National des Contractuels et Fonctionnaires de l’Éducation de Base (SYNACEB) qui est le principal affilié de la CNT (Confédération Nigérienne du Travail). La CNT, c’est justement la figure de proue de l’ITN qui regroupe 4 des 5 principales centrales syndicales du pays.
Plusieurs classes d’écoles de la capitale sont restées fermées pour cause de ce débrayage. L’impact de la grève dans une grande ville se mesure à la paralysie du secteur des transports, fait remarquer un observateur. Or, d’après lui, à Niamey, les transports intra-urbains ont fonctionné en plein régime comme d’habitude. Comme quoi les différents syndicats du secteur des transports qui avaient appelé leurs militants au respect du mot d’ordre des 48 heures n’ont pas été entendus. Au contraire, la déclaration d’autres syndicats dudit secteur se démarquant de la grève a produit un effet démobilisateur. Dès lors, ça sentait l’échec du débrayage lancé par l’Unité d’Actions Syndicales du Niger (UAS Niger). C’est comme cela que les organisateurs de la grève ont nommé leur mouvement, c’est-à-dire leur unité syndicale.
Les différents marchés de la capitale ont aussi fonctionné. Là également, dès le dimanche 26 février 2023, le syndicat national des commerçants a instruit ses membres à vaquer normalement à leurs activités les 27 et 28 février 2023.
Dans l’administration publique, il n’y a pas eu non plus de services bloqués, juste quelques agents absents, note un cadre du ministère de la Fonction Publique, militant d’un syndicat affilié à la Confédération Démocratique des Travailleurs du Niger (CDTN). Cette centrale syndicale, la plus importante du pays (position actée à l’issue des élections professionnelles, les premières organisées au Niger, en 2019) qui domine dans l’administration publique n’est pas partie prenante de cette grève.
Quel service n’a donc pas du tout fonctionné pendant ces 48 heures de grève à l’appel de l’UAS Niger ? Il n’y en a pas un. Même le secteur des télécommunications, où la prédominance des syndicats affiliés à la CNT est attestée, n’a pas été affecté, de l’ampleur attendue.
Bilan d’échec donc de la grève de 48 heures. Qu’est-ce qui peut bien expliquer cela, alors même que les revendications posées expriment les préoccupations des travailleurs ? A cette question, un observateur essaie de répondre : « il y a le fait que l’essentiel des revendications posées est déjà pris en compte dans le protocole d’accord Gouvernement/CDTN du 23 janvier 2023. Quand vous prenez par exemple la question de recrutement des contractuels de l’Enseignement à la Fonction Publique, le SYNACEB, principal allié de la CNT a acté le plan de résorption proposé par le Ministère de l’Éducation Nationale. Aussi quand cette plateforme revendicative pose le problème de la vie chère, il est clair qu’elle ne rencontrera pas l’agrément des opérateurs économiques et des organisations patronales des transports en commun et de marchandises, car demain, c’est à eux que le gouvernement demandera de consentir de sacrifices supplémentaires. En posant le problème de la présence des bases militaires étrangères au Niger, l’UAS fait sienne la polémique d’une certaine société civile taxée d’être à la remorque de l’opposition politique et entache ainsi sa plateforme revendicative ».
OUMAROU KANE