« Mets lui un mot de mort, il meurt ou mets lui un mot de vie et il vit », écrivait innocemment (aux yeux des profanes) le penseur français Victor Hugo, au début du 18è siècle. C’est en comprenant très tôt le poids et l’influence des mots sur la réalité de tous les jours que les penseurs bien inspirés du 18è siècle ont réussi à transformer tout leur continent et leur époque en « siècle des lumières », tant vanté et tant exporté à travers le monde comme une référence culturelle et intellectuelle.
Il a fallu seulement un siècle de domination coloniale sur l’Afrique noire par d’autres peuples pour faire démotiver, dérouter et endormir son peuple, jusqu’à lui faire également oublier toutes ses ambitions sociopolitiques, culturelles et économiques, alors même que le continent porte encore les tracés indélébiles des grands empires bâtis par ses aïeux. Aussi, la résonance des mots et leur sonorité de l’hymne national d’un pays doivent ainsi absolument renvoyer aux réalités directes, profondes et intimes des populations.
Plus de 60 ans de résonnance de « la Nigérienne » dans les cœurs des citoyens nigériens aura provoqué aussi bien le haut sentiment de fierté, de grandeur (le Niger puissant, qui fera le pays plus grand) et de reconnaissance à tous, que l’ambition d’aller plus loin dans la marche épique du pays vers le progrès socioéconomique et politique. Ecrit un an après la proclamation de l’indépendance, en 1961 par l’artiste français Maurice Albert Thiriet et composé par le trio d’équipe Robert Jacquet, Nicolas Abel et François Frionnet, la Nigérienne a bercé les Nigériens de toute catégorie pendant plus d’un demi-siècle.
Un demi-siècle après, beaucoup d’actions et d’évènements se sont accomplis au profit des Nigériens et d’autres défis aussi sont nés et se dressent redoutablement devant le pays pour freiner l’élan citoyen et l’ambition d’un peuple. Heureusement que les fils de la nation ne manquent pas d’idées et de solution face à ces défis.
D’autant que les Nigériens sont « nourris de la sève des mêmes idéaux, en tant que frères et sœurs d’une même Patrie, libres, forts, unis, ils nourrissent une ambition unique, celle de construire un pays des rêves réalisés, c’est-à-dire un Niger prospère incarnant ainsi la vaillance et la persévérance. Cela constitue à la fois un symbole de dignité, l’emblème et le flambeau d’une Afrique qui avance avec fierté» et assurance.
Par ce nouvel hymne aux vibrations intenses et aux sonorités fortes, les Nigériens entendent se battre, défendre la patrie jusqu’au prix de sang, et ce, en vue de construire un monde de « Justice, de Paix et de Progrès » pour eux-mêmes et pour la fierté de l’Afrique. Jamais le pays de Diori Hamani et de Mohamed Bazoum n’a fait preuve d’un tel engagement, d’une telle affirmation de soi, d’une telle détermination, d’une telle intrépidité et donc d’une telle audace à unir dirigeants et citoyens pour conquérir l’honneur de la patrie.
Plus d’un demi-siècle d’indépendance, le Niger mérite l’engagement de tous ses fils pour faire face aux défis de la sécurité, du développement et de la modernité pour s’adapter ainsi au contexte du monde numérique contemporain. Pour l’heure, le nouvel hymne national s’adapte parfaitement à la nouvelle donne sociopolitique sécuritaire et économique dans laquelle baigne la nation nigérienne.
L’intelligence humaine voudrait bien qu’on remplace un instrument de forte motivation et de mobilisation totale de tout un peuple qu’incarne l’hymne national par une version plus adaptée. Un jour viendra où « L’honneur de la Patrie » à l’instar de « La Nigérienne » subira le même sort, tout aussi fort opportunément par un concept plus adapté aux réalités de la génération du moment.
MOUSSA NAGANOU