Ce 24 Avril 2023, les nigériens vont encore commémorer l’anniversaire de la Journée nationale de la Concorde initiée depuis le 24 Avril 1995. C’est en l’honneur de la signature, le 24 Avril 1995, que les Accords de paix historiques entre le Gouvernement et l’Organisation de la Résistance Armée (ORA) ont consacré la fin des hostilités entre l’armée nationale et la rébellion touarègue qui a sévi surtout au Nord faisant de cette région une zone d’insécurité.
Les belligérants venaient de fumer le calumet de la paix, grâce aux efforts déployés par les dignes fils de ce pays ayant longtemps souffert des attaques qui ont endeuillé des familles. On était proche de la division profonde du pays entre des populations qui se sentaient marginalisées et celles qui auraient été favorisées par les pouvoirs successifs, au niveau central à Niamey.
Mais contrairement à d’autres pays comme le Mali, ravagé aussi pendant cette période par la rébellion touarègue, le Niger a su mettre en avant son génie inspirateur en matière de résolution de conflits, des négociations hors paire, afin de payer le prix de la paix. En revanche, au Mali, l’incapacité des dirigeants notamment sous la présidence d’Amadou Toumani Touré (ATT) à mobiliser l’ensemble des fils du Mali autour d’un compromis national a été fatale à la cohésion sociale et en grande partie à l’origine d’éternelles dissensions entre le pouvoir central à Bamako et les rebellions qui vont grandissante.
Loin de mépriser les groupes rebelles, au Niger, les autorités ont pris en compte leurs doléances dans la mesure du possible, en consentant des sacrifices par la pratique par exemple une discrimination positive dans les administrations en faveur de certains membres. C’est ainsi que certains recrutements dans les structures telles que l’armée nationale, la douane entre autres ont accueilli des membres des ex rebelles.
Cette volonté de dépassement des autorités nigériennes voire de l’ensemble des nigériens fut un tournant décisif pour l’instauration de la paix définitive par le dialogue qui dit-on est « l’arme des forts ». Si ces mesures perçues par certains comme une lâcheté ou une injustice vis à vis d’autres nigériens, cela a par contre permis de ramener la paix entre les dignes fils du pays, en évitant l’émiettement de la patrie, comme ce fut le cas ailleurs.
Le programme désarmement, démobilisation et réinsertion (DDR) au Niger fut un succès retentissant, en dehors même des frontières nigériennes au point de faire de ce pays un laboratoire, voire un modèle en matière de résolution de conflits. Certes, les partisans du tout militaire préféraient l’éradication des rébellions par la force, sans compter sur les conséquences néfastes qui découleraient d’une telle attitude extrémiste.
En somme, on a préféré arrêter cette folie meurtrière entre frères et sœurs d’un même pays qui partagent une histoire, une géographie et une culture humaine commune, depuis toujours. La rébellion ou les rebellions successives ont connu leur épilogue, grâce à une démarche holistique qui alliait la force militaire à l’amélioration des conditions de vie des populations. Avec le temps, le terreau de la rébellion ne pouvant plus se nourrir de revendications d’ordre social et a fini par disparaître grâce à l’occupation des jeunes qui ont commencé à amorcer une nouvelle vie par l’entremise des projets de développement mis à leur disposition par l’État du Niger.
La considération, l’empathie, voire l’estime que manifeste toute autorité vis à vis d’une franche de la population entrée en conflit avec l’État est un puissant levier de résolution du conflit. Ceux qui ont répondu par le mépris paient cher aujourd’hui le pourrissement de la crise sécuritaire dans leur pays.
C’est pourquoi, la commémoration de la Journée nationale de la Concorde chaque 24 Avril doit être désormais inscrite au fronton de la vie collective des nigériens comme la démonstration émouvante du génie inspirateur du peuple nigérien qui a réussi à faire taire les armes, les dissensions au sein de sa Nation. C’est aussi, une source d’inspiration pour la lutte contre le terrorisme qui devra prendre fin bientôt, grâce à la même démarche en coupant l’herbe sous les pieds des terroristes par des actions sociales intelligentes qui occuperont les jeunes, terreau fertile à cette peste.
ABOUBACAR SOUMAÏLA