Décidément, les coups d’État risquent d’être considérés comme une marque de fabrique de la gouvernance en Afrique. On avait cru cette pratique bannie et jetée dans les poubelles de l’histoire du mode de gouvernance politique à la faveur de la démocratie, depuis les années 1990.
Certes, le vent de la démocratie a balayé pour une grande part les régimes dictatoriaux, au point de dissuader toute velléité d’accession au pouvoir des militaires aux aguets d’une crise politique ou sociale. On croyait donc que l’irruption prétorienne des militaires sur la scène politique était tombée dans les pratiques politiques désuètes.
Hélas, depuis maintenant près de cinq ans on assiste de façon récurrente à l’irruption de soldats sur la scène politique revendiquant ainsi un mieux être pour les populations, qui seraient abandonnées par les autorités démocratiquement élues.
C’est ainsi que le Mali, le Burkina Faso, la Guinée Conakry sont devenus le théâtre des coups d’État. Malgré les sanctions des institutions régionales voire internationales, les bruits de bottes n’ont pas cessé de se faire entendre.
Malheureusement, les populations qui estiment être abusées par les autorités légitimes soutiennent dans leur grande majorité les putschistes allant jusqu’à les considérer comme des « messies » envoyés pour les sauver de la détresse causée par l’irresponsabilité des autorités en place. L’effet de contagion poursuit son chemin, en s’attaquant au Sao Tomé ou encore à la Gambie où le président Adama Barrow vient de déclarer avoir déjoué une tentative de coup d’État.
En effet, selon le porte parole du gouvernement « le gouvernement de la Gambie annonce que, sur la base de renseignements indiquant que certains soldats de l’armée gambienne complotaient pour renverser le gouvernement démocratiquement élu du président Adama Barrow. Le haut commandement a rapidement monté une opération militaire hier et a arrêté quatre soldats liés à cette supposée tentative de coup d’État ».
Une autre tentative de coup d’État de trop !
L’inquiétude d’un effet de contagion des coups de force dans la région a gagné les dirigeants africains, qui on se souvient, se sont réunis en décembre au sommet d’Abuja.
Cette rencontre a engendré une décision historique à savoir la création d’une force régionale dont la mission sera d’intervenir à la fois contre les terroristes, mais aussi en cas de coup d’État. La tentative de coup d’État en Gambie ne fait que renforcer l’utilité de cette initiative et exige que des mesures idoines soient prises pour endiguer définitivement du paradigme de la politique africaine, cette pratique d’un autre âge.
Tout en luttant sur ce front, il est tout aussi nécessaire d’investir massivement dans la création des richesses à travers l’émergence rapide d’une classe moyenne pour ne pas occulter le terreau principal des coups d’État, qui est marqué par l’insécurité grandissante et la paupérisation croissante des masses. Ainsi, on réussira à couper l’herbe sous les pieds aux militaires qui ne veulent pas assumer leur mission de défense nationale et/ou favoriser l’avènement d’une société totalement intégrée, développée et émancipée de ses pathologies politiques et socioéconomiques.
ABOUBACAR SOUMAÏLA