Société : Le Niger adapte son Code Pénal au contexte sociopolitique !

Après plusieurs tentatives de reformes du code pénal nigérien, cette fois-ci est la bonne. Parce que pour la première fois, le pays vient d’engager une reforme audacieuse du code pénal pour se mettre au diapason du progrès, de l’innovation, en vue de prendre en compte le contexte socioéconomique et politique lié notamment à la modernisation de la société et ses nouvelles réalités.

Dans sa politique nationale de reforme juridique visant à accompagner la chaine pénale, le Niger vient d’amorcer un pas important, sinon un pas de géant. D’autant que le gouvernement a reçu officiellement du comité national chargé de relecture du code pénal et du code de procédure pénale, ce Lundi 27 Mars 2023 l’avant-projet du nouveau code pénal.

Un avant-projet de code pénal reçu officiellement par le ministre de la Justice, Garde des Sceaux, Ikta Mohamed des mains du président du comité national chargé de relecture du code pénal et du code de procédure pénale, OUSSEINI DJIBAGE Maman Sani avec tous les membres. Il faut dire que c’est par une cérémonie solennelle digne de tous les qualificatifs d’honneur et de considération que le Garde des Sceaux nigérien a reçu l’avant-projet du code pénal pour adoption en conseil des ministres et soumission à l’Assemblée nationale, dès la session des lois d’Avril prochain.

Fruit d’un travail ardu de près d’un an réalisé en huit (8) sessions ordinaires, trois (3) sessions extraordinaires et trois (3) ateliers régionaux du comité national chargé de relecture du code pénal et du code procédure pénale, « l’avant-projet du nouveau code pénal compte 609 articles, 95 sections, 72 chapitres, 9 titres et 3 livres », selon le président du comité Maman Sani Ousseïni Djibagé contre l’ancien code qui conservera pour l’histoire ses « 408 articles, 3 livres, 106 sections, 64 chapitres et 10 titres », dès que le nouveau code pénal sera adopté et promulgué, indique la même source.

Dans cette perspective de reforme juridique, le Niger traduit ainsi son ambition de rompre avec le passé et d’améliorer, d’adapter, de rendre efficace, accessible et surtout équitable son système judiciaire, en sortant le code pénal de la nuit des temps immémoriaux de l’époque Napoléonienne de 1810 (Bonaparte) et inadaptés pour prendre effectivement en charge les questions de paix et de sécurité d’aujourd’hui.

L’avant-projet du nouveau code pénal présente d’importantes innovations, en ce sens qu’il supprime certaines dispositions devenues obsolètes, la création des nouvelles infractions et l’adaptation de certaines infractions pénales en vue de mieux les encadrer en insistant soit sur le quantum de la peine ou sur la sanction pécuniaire (l’amende).

Précisons à toute fin utile, que l’avant-projet du nouveau code pénal a pris en compte les nouvelles préoccupations de la société nigérienne, notamment en ce qui concerne « les infractions mal définies ou encore celles non définies ont été reprécisées et encadrées de manière à éviter toutes interprétations tendancieuses », indique le président Maman Sani Ousseïni Djibagé. C’est également dans cette perspective que les questions de « détournement des biens publics, la lutte contre la corruption, qui gangrène la société, la mendicité et l’administration de la justice » dont l’avant-projet du code a prévu « le délit d’immixtion dans le fonctionnement de la justice, définie comme toute pression provenant de quiconque et de quelque nature que ce soit, exercée sur un juge en charge d’un dossier ou toute entrave, tout ordre donné, tout artifice, toute déclaration, toute manifestation publique de nature à influencer le cours normal d’une instance ou tendant à empêcher ou à retarder l’exécution d’une décision de justice. Si c’est le juge lui-même qui aliène son indépendance par quelque procédé que ce soit, des mesures  plus sanctionnatrices ont été également prévues », explique le président Maman Sani Ousseïni Djibagé.

Quant à la question sur la mendicité, « nous avons proposé, qu’au lieu de punir le mendiant lui-même, de sanctionner plutôt les parents des mineurs se livrant habituellement à la mendicité ou tous ceux qui les poussent à mendier ou qui en tirent sciemment profit », précise le président Djibagé. Au sujet de la corruption, le président Djibagé explique « qu’aucune personne ne puisse s’y soustraire, le Comité propose de viser explicitement comme éventuels auteurs, toute personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, toute personne investie d’un mandat électif public, toute personne membre des forces de défense et de sécurité ». 

Concernant le détournement des biens publics, qui est sur le feu de l’actualité, le comité « propose des mesures tendant à l’aggravation de la sanction contre les auteurs et surtout à remettre l’Etat dans ses droits », dixit le président Djibagé. Issu d’un processus inclusif et participatif, l’avant-projet du nouveau code pénal présente des véritables innovations en correctionnalisant déjà certaines infractions, tout comme en harmonisant et intégrant «également des dispositions pertinentes des instruments juridiques internationaux, régionaux et sous-régionaux auxquels le Niger est partie, tels que le Statut de Rome, la Convention contre la torture, la Convention contre la disparition forcée, les actes uniformes de l’OHADA, les textes de l’UEMOA, de la CEDEAO pour ne citer que ceux-ci seulement. Il faut aussi noter que toutes les lois éparses modificatives du Code pénal y ont été intégrées. Les lois spéciales seront jointes en annexes du document final ».

« La justice, l’équité et les droits humains constituent également un pilier fondamental pour la construction de l’Etat de droit et la consolidation des Institutions démocratiques et républicaines. A ce niveau, l’action gouvernementale visera principalement l’amélioration de la qualité de notre système judiciaire afin qu’il soit plus équitable et accessible à tous, avec en toile de fond, une lutte résolue contre la corruption », explique le ministre et Garde des sceaux nigérien, Abdoulaye Ikta Mohamed.

Précisons que le comité de relecture du code pénal et du code de procédure pénale a vivement remercié la mission d’Eucap Sahel au Niger pour son accompagnement constant ainsi que les autres partenaires techniques et financiers. Le ministre de la Justice en a également réitéré sa reconnaissance à l’endroit de l’ensemble des partenaires techniques et financiers.

MOUSSA NAGANOU

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Author: Mourya Niger